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La Nouvelle-Calédonie depuis 1946 : évolution politique

samedi 30 juillet 2022 par Emmanuelle DAVER

Groupe de réflexion pédagogique Histoire-Géographie-EMC Collège
S’approprier les thèmes adaptés du programme de 3e
Thème 3 - Françaises et Français dans une République repensée
La Nouvelle-Calédonie depuis 1946 : évolution politique

Le programme

La Nouvelle-Calédonie depuis 1946 : évolution politique.
Cette étude est centrée sur l’évolution statutaire de la Nouvelle-Calédonie et les réactions qu’elle suscite.

Pourquoi enseigner « La Nouvelle-Calédonie depuis 1946 : évolution politique » ?

Après la Seconde Guerre mondiale, les relations entre la France et la Nouvelle-Calédonie progressent sur des bases plus démocratiques associées à l’autonomie politique. Avant 1946, la Nouvelle-Calédonie avait le statut de colonie française. En 1946, elle devient un territoire d’outre-mer (TOM). Comment, depuis 1946, les statuts successifs de la Nouvelle-Calédonie redéfinissent-ils ses liens avec la France ?

Problématique : Quelle est l’organisation administrative de la Nouvelle-Calédonie depuis 1946 ? Quels différents statuts politiques successifs ont permis de construire des institutions propres à la Nouvelle-Calédonie ?

On cherchera de manière prioritaire à faire comprendre à l’élève :

  • Les différents statuts politiques qui se sont succédé depuis 1946
  • La spécificité institutionnelle de la Nouvelle-Calédonie

Mise au point scientifique : quels sont les points forts du thème pour l’enseignant ?

De l’après-guerre aux temps difficiles des « Événements » des années 1980 et à la paix retrouvée des années 1990, l’histoire de la Nouvelle-Calédonie a été marquée par une évolution complexe.
L’histoire de la Nouvelle-Calédonie de 1946 à nos jours est d’abord celle de la fin de l’époque coloniale mais aussi celle d’une incapacité à mettre en oeuvre un statut institutionnel stable, ce qui a favorisé l’émergence de la revendication d’indépendance kanak au milieu des années 1970.
Les années 1980 constituent une rupture violente. Comment passe-t-on de l’expérience de l’autonomie à la revendication indépendantiste kanak qui conduit à la période dite « des Événements » aboutissant à une fracture qui aurait pu être définitive. Mais la sagesse semble l’emporter avec la paix retrouvée des Accords de Matignon (1988) et la solution consensuelle de l’Accord de Nouméa (1998). On parle alors de « destin commun », « d’avenir partagé » pour que cessent les fractures qui ont tant blessé la Nouvelle-Calédonie.

Plusieurs périodes sont à distinguer :

  • Après la Seconde Guerre mondiale, en 1946, la Nouvelle-Calédonie change de statut. Elle cesse d’être une colonie et devient un Territoire d’Outre-Mer (TOM). Les Kanak, jusqu’alors « sujets français », obtiennent la citoyenneté française et le droit de vote dont les effets ne seront complets qu’en 1957.
  • L’expérimentation de l’autonomie (1957-1975).
    En 1957, le statut issu de la loi-cadre Defferre de 1956 accorde au Territoire l’autonomie interne : l’Assemblée territoriale remplace le Conseil général et, mais surtout, un conseil de gouvernement au rôle délibératif avec des ministres partage avec le gouverneur l’exécutif du Territoire. Mais le statut Jacquinot de 1963 réduit fortement l’autonomie : le conseil de gouvernement perd ses ministres et n’a plus qu’un rôle consultatif auprès du gouverneur qui reste l’exécutif du Territoire. En 1969 les lois Billotte restreignent davantage les attributions du Territoire : elles soumettent l’activité minière à l’État et remplacent les municipalités de droit local par les communes qui deviennent des collectivités territoriales de la République.
    Mais alors que, jusqu’à la fin des années 1960, les Kanak ne remettaient pas en cause la souveraineté française, les choses changent dans la décennie suivante. Une majorité de Kanak, et d’autres personnes issues d’autres communautés, revendiquent désormais l’indépendance kanak. Le festival Mélanésia 2000, organisé à Nouméa, par Jean-Marie Tjibaou, affirme l’identité kanak.
  • Des réformes pour contrer la revendication indépendantiste (1976-1981).
    En 1976 le statut Stirn revient à plus d’autonomie en redonnant au conseil de gouvernement un pouvoir délibératif. L’État lance en 1978 la réforme foncière pour répondre à la revendication kanak sur les terres.
    En 1979, le « statut Dijoud » confirme l’autonomie de la Nouvelle-Calédonie.
  • Des « Événements » à la paix retrouvée des Accords de Matignon (1981-1988).
    En juillet 1983, la table ronde de Nainville-les-Roches reconnaît aux Kanak un « droit inné et actif à l’indépendance », et jette les bases du « statut dit Lemoine » qui en 1984 va s’appliquer à la Nouvelle-Calédonie. Ce statut Lemoine préparatoire à l’exercice de l’autodétermination donne à la Nouvelle-Calédonie une pleine autonomie avec création d’un Gouvernement du Territoire dont le président est élu et dont les membres sont des ministres de plein exercice. Ce statut prévoit au bout de trois ans un référendum d’autodétermination en Nouvelle-Calédonie. Mais il ne prévoit pas de durée de présence en Nouvelle-Calédonie pour appartenir au corps électoral amené à élire l’Assemblée territoriale et ne prévoit qu’une durée de trois ans de présence pour pouvoir voter au référendum d’autodétermination. C’est la raison pour laquelle les élections de novembre 1984 qui mettent en place ce statut Lemoine sont boycottées par les indépendantistes qui voulaient des restrictions plus sévères à ces deux corps électoraux. Ces « élections de la violence » marquent le début de la période dite des « Événements » (cette période est marquée par des morts, des expulsions, des incendies, des grèves, des manifestations, des barrages, des explosions de bombes, des sabotages, des arrestations, des opérations militaires). Le FLNKS (Front de libération nationale kanak et socialiste) est créé en septembre 1984. En 1985, Edgard Pisani au nom de l’État propose l’indépendance-association comme solution au problème calédonien, mais c’est un refus tant des indépendantistes que des non-indépendantistes. En 1987, le statut Pons reprend les grandes lignes du statut Fabius-Pisani mais avec un redécoupage des régions et la programmation d’un référendum d’autodétermination en 1987 sur la base d’un statut d’autonomie rénové dans la France et ouvert aux électeurs présents en Nouvelle-Calédonie depuis au moins trois ans. Les indépendantistes le boycottent, la participation est de 57 % et le OUI l’emporte par 98 % des suffrages exprimés.
  • Les Accords de Matignon-Oudinot
    L’année 1988 est marquée par le drame d’Ouvéa en avril/mai. La crise calédonienne atteint son paroxysme. Pour en sortir, le Premier ministre Michel Rocard envoie en Nouvelle-Calédonie une mission du dialogue dirigée par Christian Blanc. Elle prépare la signature à Paris, le 26 juin 1988, de l’Accord de Matignon entre l’État, les indépendantistes et les non-indépendantistes. La poignée de mains échangée à cette occasion entre Jacques Lafleur et Jean-Marie Tjibaou symbolise le retour à la paix. L’Accord de Matignon, complété par l’Accord-Oudinot du 20 août 1988, crée les trois provinces, lance le rééquilibrage et programme pour 1998 un nouveau référendum d’autodétermination ouvert aux personnes arrivées en Nouvelle-Calédonie au plus tard en 1988. L’Accord de Matignon est adopté par un référendum national le 6 novembre 1988 : le OUI recueille 80 % des suffrages exprimés pour l’ensemble français mais seulement 57 % en Nouvelle-Calédonie.
  • L’Accord de Nouméa
    Le référendum d’autodétermination prévu en 1998 n’a pas eu lieu. Il a été remplacé, par consensus, par un référendum local d’approbation de l’Accord de Nouméa signé le 5 mai 1998 par les trois partenaires de l’Accord de Matignon. L’Accord de Nouméa a été approuvé par 72% des suffrages exprimés.
    La solution consensuelle de l’Accord de Nouméa a été complétée par une loi organique du 19 mars 1999. Le nouveau statut issu de l’Accord de Nouméa est celui d’une collectivité « sui generis » qui fait sortir la Nouvelle-Calédonie du statut de TOM. Signé pour une durée de 20 ans, il est transitoire et prévoit avant son terme l’exercice par les « populations intéressées » de Nouvelle-Calédonie du droit à l’autodétermination à condition d’y être arrivé au plus tard fin 1994. Ce statut rend une complète autonomie à la Nouvelle-Calédonie en la dotant d’un gouvernement élu par le congrès, organise un transfert progressif des compétences de l’État vers la collectivité calédonienne et crée une citoyenneté de la Nouvelle-Calédonie fondant les restrictions du droit de vote au congrès et aux assemblées de province.
    Sur la base de l’Accord de Nouméa, trois consultations référendaires d’autodétermination ont été organisées sous le contrôle de l’ONU. La première, le 4 novembre 2018, a vu le NON à l’accession à la pleine souveraineté et à l’indépendance l’emporter par 56,67% des suffrages exprimés. La deuxième consultation du 4 octobre 2020 a confirmé la victoire du NON à 53,26%. La troisième et dernière consultation, celle du 12 décembre 2021, a vu la non-participation des indépendantistes. Le NON l’a emporté à 96,5% des suffrages exprimés.
    Reste à construire dans le consensus local et national la solution statutaire d’avenir de la Nouvelle-Calédonie. Elle passera par une révision de la Constitution.

Comment mettre en oeuvre le thème dans la classe ?

On pourra aborder dans le thème 2 d’histoire « Le monde depuis 1945 », chapitre 1 « Indépendance et construction de nouveaux États », que la Nouvelle-Calédonie est concernée par le débat sur la décolonisation. On évoque la fin de la colonie, celle de l’indigénat et la mise en place du statut de TOM. On insiste sur l’élargissement de la citoyenneté française à toute la population de la Nouvelle-Calédonie. Cela permettra d’introduire la question de l’évolution politique de la Nouvelle-Calédonie depuis 1946.
Puis dans le thème 3 d’histoire « Françaises et Français dans une République repensée », chapitre 2 « La Ve République », on abordera l’émergence du mouvement indépendantiste et les reprises en main par l’État sans entrer dans une étude exhaustive des différents statuts. On présentera aussi la rupture des « Événements » et on montrera comment la question calédonienne liée au drame d’Ouvéa a conduit au règlement négocié par les Accords de Matignon-Oudinot en 1988.
Enfin on abordera la recherche d’une solution consensuelle et son aboutissement avec l’Accord de Nouméa et la loi organique du 19 mars 1999.
Nous pourrons aussi traiter la question des institutions calédoniennes en EMC lors de l’étude de la vie démocratique.

Pistes bibliographiques

  • ANGLEVIEL Frédéric, Brève histoire politique de la Nouvelle-Calédonie contemporaine (1945-2005), publication du groupe de recherche en histoire océanienne contemporaine (GRHOC), Nouméa, 2006.
  • BARBANÇON Louis-José, Il y a 25 ans : le gouvernement Tjibaou (18 juin 1982 - 18 novembre 1984), Cahiers des conférences de l’ADCK, Nouméa, 2008.
  • BENSA Alban, La Nouvelle-Calédonie vers l’émancipation, Découvertes Gallimard Histoire, Évreux, 2002.
  • BROU Bernard, 1945-1977, 30 ans d’histoire de la Nouvelle-Calédonie, Société des études historiques de Nouvelle-Calédonie, n° 31, Nouméa, 1982.
  • CHRISTNACHT Alain, « La Nouvelle-Calédonie », Notes et études documentaires, n° 5184-5185, La documentation française, Paris, 2004.
  • DEVAUX Marianne, « Présentation synthétique de l’histoire statutaire de la Nouvelle-Calédonie » – in L’Organisation de la Nouvelle-Calédonie – Institutions et régime législatif - CDP Nouméa Nouvelle-Calédonie – Collection Université, 1997.

Ouvrages collectifs

  • L’Histoire du pays kanak, édition IKS, numéro spécial de L’Avenir Calédonien n°894.
  • L’Éducation civique en Nouvelle-Calédonie – documents pédagogiques, ouvrage collectif, sous la coordination de TORRE Évelyne, IA-IPR d’Histoire-Géographie-éducation civique, Nouméa, août 2001
  • L’Éducation civique en Nouvelle-Calédonie, Scérén CDP Nouvelle-Calédonie, sous la coordination d’AMIOT Isabelle, chargée de mission d’inspection en histoire-géographie-éducation civique, Nouméa, février 2014
  • Histoire et Géographie, La Nouvelle-Calédonie et l’Océanie, CDP NC, 2010, pages 76 à 90
  • Actes du colloque universitaire sur l’avenir institutionnel de la Nouvelle-Calédonie, 17 & 18 novembre 2017 – LARJE UNC - Sous la direction de BOYER Jean-Marc, CHAUCHAT Mathias, GIRAUDEAU Géraldine, GOROHOUNA Samuel, GRAVELAT Caroline, RIS Catherine

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30 juillet 2022
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