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Le monde océanien à l’époque pré-européenne

vendredi 29 janvier 2016 par Valérie RIEUX

 INTRODUCTION

Fiche d’accompagnement des programmes de 5e
HISTOIRE I. Les civilisations océaniennes

Rappel : les deux thèmes de la première partie du programme occupent environ 20 % du temps annuel consacré à l’histoire.
Cette partie du programme fait suite au thème « Les débuts du peuplement en Océanie et en Nouvelle-Calédonie » étudié en 6e. Cette étude a permis de mettre en évidence l’origine asiatique des Océaniens, les différentes vagues de migrations constituant le peuplement de l’Océanie pour aboutir à une carte des grandes aires culturelles océaniennes.
En 5e, il s’agit d’aborder les civilisations océaniennes à partir de deux grands thèmes :

  • le monde océanien à l’époque pré-européenne
  • la civilisation kanak traditionnelle.
    Thème 1. Le monde océanien à l’époque pré-européenne

  I. PROBLÉMATIQUE

Le programme invite à faire constater aux élèves qu’à partir d’une même origine austronésienne, les civilisations océaniennes se sont différenciées.
Mais, ces différenciations ne donnent pas naissance à trois espaces cloisonnés et sans relations et échanges les uns avec les autres. En effet, il s’agit de mettre en évidence la « solution de continuité entre ethnies mélanésiennes et polynésiennes » que démontrent depuis 1970 les travaux des archéologues. Il faudra donc se garder de proposer aux élèves une vision européo-centrée qui s’est figée au XIXe siècle, où la géographie des îles finit par se superposer à des distinctions raciales et aboutit à la division actuelle de l’Océanie en trois aires culturelles. En outre, l’homogénéité culturelle de chaque ensemble est imparfaite : un relatif isolement insulaire et le souci qu’ont les ethnies de se distinguer les unes des autres ont favorisé l’éclosion de particularismes locaux.
Dans cet esprit, l’enseignant privilégiera une comparaison entre les sociétés mélanésiennes et polynésiennes pour présenter, certes des différences mais aussi de nombreux points communs au niveau linguistique, religieux et social.

 Organisation sociale et politique

En Océanie, les sociétés sont hiérarchisées. Les hiérarchies sont plus ou moins développées selon les archipels. Elles reposent sur des statuts acquis ou hérités.

  • Civilisation mélanésienne : Plutôt des statuts acquis. Notion d’ « hommes influents », « Grands hommes », « Big men » reconnus par la communauté son pouvoir est fondé sur l’accumulation et la redistribution de biens de prestige (porcs, produits horticoles). Ces « chefs » sont en compétition pour obtenir un pouvoir politique et rituel qui se manifeste par la célébration de cérémonies coûteuses et des dépenses somptuaires OU Un pouvoir à caractère électif/héréditaire temporaire partagé entre les clans et les lignages à l’échelle locale.
  • Civilisation polynésienne : Plutôt une société hiérarchisée, plus ou moins développée selon les archipels. Un chef, un noble de haute lignée « Ariki » « Ari’i », des nobles qui possèdent la terre, des guerriers, des prêtres, et la masse des non possédants la force de travail. Le pouvoir est héréditaire, il se transmet par filiation ambilinaire (la filiation se transmet par les hommes et les femmes mais, chaque génération choisit à quelle lignée elle souhaite se rattacher) la règle de primogéniture s’applique.Personnages sacrés (« tapu » ou « tabu »), ils ont droit de vie ou de mort sur leurs sujets, ils président les rituels dans les marae. Ils arborent les insignes de ce pouvoir : parures, bâton de commandement, casque à crête …

 Croyances et pratiques

Le polythéisme où l’on distingue des divinités supérieures et inférieures, coexiste avec un culte des ancêtres qui sont des héros culturels fondateurs d’ascendance divine. Il s’agit de se concilier la protection des ancêtres/dieux, et des éléments naturels. La transmission des mythes est orale. Ils proposent une explication du monde ou une représentation des valeurs propres à la société et établissent des généalogies. Les mythes, dont les formes ne sont pas figées, sont récités par des spécialistes qui peuvent intégrer des faits et des personnages nouveaux pour actualiser les connaissances ou intégrer un événement remarquable. Mais, les rites, les lieux de « culte » diffèrent.

  • Civilisation mélanésienne : Les ancêtres défunts deviennent des dieux dont les vivants attendent protection et bienfaits. Leur esprit s’incarne dans des sculptures ou bien leur crâne sont conservés dans des lieux sanctuarisés (ex les bosquets sacrés, grottes, banians, maisons cérémonielles de clans, ….). Avant toute entreprise, les vivants demandent aux ancêtres leur bénédiction, leur demandent conseil, les interroge sur les décisions à prendre. Les allées plantées d’arbres, les tertres coiffés d’une maison cérémonielle, les sites rituels en forêt sont autant de sanctuaires. Les rites concernent aussi des catégories d’objets investis de pouvoirs particuliers (ex pierres magiques) en lien avec un principe naturel (soleil, pluie, fertilité des sols …). On distingue des mythes d’une grande diversité qui sont propres aux clans, aux régions. Ils mettent en scène des ancêtres présents « au début du monde » et « descendus » du ciel pour transmettre des valeurs, des savoir-faire, des explications sur l’origine de l’homme ….
  • Civilisation polynésienne : Les chefs sont descendants des dieux par voie généalogique. Le marae (sanctuaire qui appartient au chef reflète la hiérarchie sociale) est un sanctuaire, un lieu de sacrifices et d’offrandes qui appartient au chef. Il est délimité par une enceinte rectangulaire en pierre, d’une place pour les assemblées, d’une plate-forme en terrasse dédiée aux dieux, et d’un autel. Il existait aussi des marae familiaux ou communs à plusieurs archipels. Le marae joue aussi un rôle social et politique. Des effigies en bois ou en pierre sculptés (« Ti’i ou Tiki) représentent des esprits secondaires ou des ancêtres de renom que l’on gardait soit dans l’enceinte du marae soit dans les maisons ou aux limites du district. Les sacrifices humains ou d’animaux font partie des pratiques. Clergé. Les mythes polynésiens relatent la création du cosmos qui remplace le « vide » après une évolution. Il existe un dieu créateur (Tonga, Fidji, Samoa) ou des mythes personnalisés (terre : mère, ciel : père …). Le panthéon polynésien compte de nombreux personnages/héros qui accomplissent des actes fondateurs la création des îles, la naissance d’un peuple ou la transmission d’un savoir-faire …).

 Vie économique et matérielle

Le lien à la terre nourricière est primordial. Les tubercules, introduits par les Austronésiens lors des premières migrations, sont la base de l’alimentation (igname, taros, patate douce, manioc). Ils apportent aussi avec eux des plantes vivrières, qui sont le fondement de l’économie de subsistance en Polynésie (arbre à pain, bananiers, cocotiers, cordyline au tubercule comestible). Toutes ces plantes sont cultivées à l’aide d’un outillage lithique (herminette). Les protéines proviennent des poissons et autres produits marins mais aussi de la chasse. Les animaux domestiques sont réservés aux échanges ou à la consommation lors des fêtes ou cérémonies. Les objets du quotidien (paniers, nasses, parures, tapas, nattes, couverture des cases, « vêtements » …) sont fabriquées à partir des ressources naturelles disponibles (ex bambou, cocotier, liane.). Les échanges sont d’ordre cérémoniels (politiques) sur la base du don et du contre-don ou économiques (trocs). Ils sont fréquents et peuvent engager de nombreux partenaires sur une grande distance.

  • Civilisation mélanésienne : Se référer à la fiche La société kanak traditionnelle (1OOO-1774).
  • Civilisation polynésienne : Dans les îles hautes ou basses de Polynésie, les terres sont rares et pauvres. Tous les espaces disponibles sont exploités. La production horticole est essentiellement constituée de taros, fruits de l’arbre à pain, bananiers et cocotiers. L’alimentation est complétée par les produits de la pêche hauturière (requins, tortues, dugong, baleineau …) et de collecte sur les récifs ou les mangroves (coquillages, concombres de mer, poulpes …)

 Langues

Historiquement parlant, les langues d’Océanie possèdent un ancêtre commun la langue parlée en Asie du Sud-Est vers 3500 av. J.-C. par les navigateurs austronésiens qui peuplent l’Océanie insulaire à partir de 1500 av. J.-C. C’est par sa langue que ce groupe est nommé. Les langues austronésiennes ont évolué peu à peu d’île en île et abouti à une très grande diversité. La linguistique est sollicitée pour retrouver les étapes de peuplement du Pacifique.

  • Civilisation mélanésienne : On assiste en Mélanésie à un fort morcellement linguistique dans les archipels (110 langues parlées au Vanuatu, 74 au Salomon, 28 en Nouvelle-Calédonie). La pratique du plurilinguisme s’explique par un désir de différenciation.
  • Civilisation polynésienne : Les îles de Polynésie présentent une plus grande unité linguistique, malgré la dispersion des archipels sur un large espace, parce que le peuplement est plus récent.

 II. PISTES POUR LA MISE EN OEUVRE

En classe de 4e, nous devons étudier les premiers contacts en tant qu’exemple. Les programmes nous invitent à mettre en oeuvre des emboitements d’échelles. Dans cet esprit, il est possible d’étudier les civilisations océaniennes après « les débuts de l’Islam » et « L’Occident féodal » et avant « les découvertes européennes et la conquête des empires », abordée dans la partie « IV. Vers la modernité, fin XVe – XVIIe siècle ». Dans la séquence « I - Les civilisations océaniennes », il est possible d’inverser les thèmes 1 et 2 et ainsi de commencer par l’étude de la civilisation kanak traditionnelle puis de poursuivre avec les civilisations océaniennes. Il sera plus aisé de construire la comparaison avec le monde polynésien à partir des acquis des élèves.

 III. CONCLUSION

Malgré une diversité frappante due à la dispersion géographique et à la multiplicité des configurations sociales ou artistiques observables, il se pourrait que les spécialistes et les Océaniens eux-mêmes mettent à l’avenir davantage l’accent sur l’unité culturelle et psychologique des différentes cultures austronésiennes. Cette unité allait d’ailleurs de soi pour les premiers voyageurs ou missionnaires. Les grandes caractéristiques des genres de vie et l’organisation économique et sociale ne sont que les variantes d’un modèle commun : les techniques de mise en valeur du sol, les plantes cultivées et les animaux domestiques ne diffèrent guère d’un archipel à l’autre ; on retrouve à peu près partout les mêmes soucis d’équilibre entre les différentes forces composant le corps social. Les relations de parenté et d’alliance et les échanges cérémoniels ou économiques qui les accompagnent jouent partout un rôle prépondérant. Du point de vue religieux, les systèmes cosmologiques donnent naissance à des ancêtres qui engendrent eux-mêmes les groupes sociaux. Ces ancêtres sont l’objet de cultes et interviennent dans les nombreuses pratiques magiques

Jean-Paul Latouche, article « Austronésiens », Encyclopédie Universalis.

 IV. BIBLIOGRAPHIE ET SITOGRAPHIE

  • Sous la direction de Frédérique VALENTIN, Hommes, milieux et traditions dans le Pacifique, Travaux 9, Édition de Boccard, 2010.
  • TCHERKEZOFF Serge, Polynésie / Mélanésie L’invention des « races et des régions de l’Océanie » Au Vent des Iles, Éditions Tahiti, 2008
  • ARGOUNES, MOHAMED-GAILLARD, VACHER, Atlas de l’Océanie, Continents d’îles, laboratoire du futur, Édition Autrement, 2011
  • Sous la direction de Michel LEXTREYT et Frédéric ANGLEVIEL, Sciences Humaines 6e, Hommes et espaces d’Océanie, CTRDP Nouvelle-Calédonie, 1994
  • Sous la direction de Michel LEXTREYT et Frédéric ANGLEVIEL, Sciences Humaines 5e, Hommes et espaces d’Océanie, CTRDP Nouvelle-Calédonie, 1995
  • Sous la direction d’Yves JACQUIER et la coordination d’Isabelle AMIOT et Christiane TERRIER, Ouvrage collectif, Histoire Cycle 3 Nouvelle-Calédonie, SCEREN CDP Nouvelle-Calédonie, février 2007
  • ANGLEVIEL Frédéric, Les religions du Pacifique, hier et aujourd’hui, article CLIO 2003 : http://www.clio.fr/bibliotheque/les...
  • Encyclopédie Universalis : http://www.universalis.fr
  • Jean-Paul LATOUCHE, « AUSTRONÉSIENS », Encyclopædia Universalis
  • http://www.universalis.fr/encyclope...
  • Conseil des musées de Poitou-Charente : http://www.oceaniedeslumieres.org
  • Site internet très complet sur l’histoire de la découverte de l’Océanie
  • Musée de Tahiti et des îles : http://www.museetahiti.pf
  • Musée du Quai Branly : www.quaibranly.fr
  • Institut d’archéologie de la Nouvelle-Calédonie et du Pacifique : http://www.iancp.nc

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