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La Nouvelle-Calédonie dans l’espace Pacifique aujourd’huiL

samedi 26 décembre 2015 par Henri LALIE

Quelle est la place de la Nouvelle-Calédonie dans son environnement régional du Pacifique ? Que permet son statut actuel dans ses relations régionales ?

 I. La Nouvelle-Calédonie et les États et territoires du Pacifique (carte de l’Océanie)

La subdivision de l’Océanie en trois aires culturelles que nous connaissons aujourd’hui a donné lieu à des débats dans l’histoire. Le dernier découpage de Dumont D’Urville, (Mélanésie, Polynésie, Micronésie) est finalement celui qui sera retenu généralement. Ainsi, les habitants du Pacifique se revendiquent autant de l’océan Pacifique que du continent Océanie.
Pour une plus grande clarté de notre étude, on relève 4 grands ensembles d’États et de Territoires possédant des statuts politiques variés (pays indépendants, États associés, territoires dépendants…)

 1) Les puissances riveraines de l’Ouest, l’Australie et la Nouvelle-Zélande

  • L’Australie : 7,7 millions de km2 / 23,7 millions d’habitants, deux villes de niveau mondial : Brisbane 2 millions d’habitants et Sydney 4,6 millions. Puissance régionale (13e économie mondiale : ressources minérales, énergétiques, agricoles…) Bailleur de fonds n°1 pour les pays océaniens (PNG, îles Cook, Tonga, Vanuatu). Des relations anciennes avec la Nouvelle-Calédonie, qui ont connu des hauts et des bas. Aujourd’hui les relations sont bonnes.
  • La Nouvelle-Zélande, joue un rôle plus modeste dans les échanges avec le Pacifique. Elle est associée politiquement avec les îles Cook, Niue et Tokelau. Niveau de vie comparable à la Nouvelle-Calédonie. De bonnes relations avec la Nouvelle-Calédonie, depuis l’affaire du Rainbow Warrior et les essais nucléaires de la France en Polynésie française.
  • Les liens qu’entretiennent ces deux pays avec le monde occidental leur confèrent un rôle de puissance politique dans la région (alliances militaires avec les États-Unis et l’ASEAN) et relais de la mondialisation. Ils constituent des destinations privilégiées des Calédoniens, pour des raisons de proximité géographique : l’Australie comme la Nouvelle-Zélande sont à moins de 3 heures d’avion de la Nouvelle-Calédonie.

 2) Les voisins mélanésiens

Les pays mélanésiens constituent les terres émergées les plus importantes du Pacifique en dehors de l’Australie et de la Nouvelle-Zélande. Leurs ZEE recouvrent 7 794 000 km2 dont 1 740 000 pour la Nouvelle-Calédonie. Les pays de la Mélanésie ont des économies essentiellement agricoles et touristiques, à l’exception de la Nouvelle-Calédonie (nickel : activités minières et métallurgiques) qui est classée au 78e rang mondial pour l’IDH (Australie 12e et NZ 36e).

 3) Les marges de l’Est : la Polynésie

Les États et territoires de la Polynésie (sauf la Nouvelle-Zélande) sont caractérisés par une multitude d’îles hautes et d’atolls de très faibles superficies (8 300 km2 de terres émergées) et par une immense ZEE (9 484 000 km2). Plusieurs types de statuts politiques :

  • États indépendants : Samoa (1962), Tonga (1970), Tuvalu (1978), Palau (1994)
  • États librement associés à un autre pays : îles Cook, Niue, Tokelau (Nouvelle-Zélande)
  • État intégré à une grande puissance : Samoa américaines
  • Collectivités françaises d’outre-mer : Wallis-et-Futuna, Polynésie française

Des inégalités entre Polynésiens : Polynésie française 3 660 km2 pour 288 000 habitants / Tokelau 10 km2 pour 1 500 habitants ou Tuvalu 26 km2 pour 10 200 habitants. Les pays polynésiens associés à d’autres pays ou non encore indépendants connaissent un développement plus visible et correct. La Polynésie française a le même IDH (0,895) que la Nouvelle-Calédonie. Les deux collectivités françaises du Pacifique ont des liens privilégiés historiques avec la France métropolitaine.

  4) La méconnue : la Micronésie

7 entités politiques se partagent un espace maritime de plus de 10 millions de km2 et une surface terrestre de 3 200 km2. Elles regroupent 539 000 habitants. La population la plus importante est celle de Guam (180 000 habitants). Les statuts politiques sont variés :

  • État indépendant pour Kiribati et Nauru
  • Territoire non incorporé des États-Unis : Guam (base stratégique militaire pour les États-Unis)
  • États en association avec les États-Unis : États Fédérés de Micronésie, îles Marshall, les Mariannes du Nord (indépendantes depuis 1994).

Les États et territoires de Micronésie vivent surtout de leur vaste ZEE et des aides que leur octroient les pays associés (bases de pêche, pavillons de complaisance, bases militaires, îles Marshall = siège des expérimentations nucléaires américaines entre 1950 et 1960) et un peu de tourisme. L’accessibilité depuis la Nouvelle-Calédonie est difficile, car il faut plus de 20 heures d’avion pour atteindre ces îles car il n’y a pas de ligne directe.
On a parlé pour les petits États insulaires du Pacifique du modèle MIRAB, c’est-à-dire, une économie qui se caractérise par une injection massive de capitaux en provenance des pays tuteurs comme la Nouvelle-Zélande ou l’Australie et de l’aide
internationale (Migrations Remittances Aid and Bureaucraty). Il existe cependant des perspectives, comme le tourisme et l’exploitation de futures ressources récemment recensées dans les îles mélanésiennes de Papouasie Nouvelle-Guinée et Salomon.

 II. La Nouvelle-Calédonie de l’Accord de Nouméa et ses relations régionales

L’histoire politique actuelle de la Nouvelle-Calédonie est partie prenante de l’histoire du Pacifique du point de vue du processus de décolonisation qui a commencé dès la fin de la Seconde Guerre mondiale sur les autres continents, et qui touche de manière tardive notre espace d’étude. La particularité de la Nouvelle-Calédonie à cet effet, est qu’elle expérimente devant le monde une décolonisation particulière issue d’une histoire douloureuse, qui a pris fin avec les Accords Matignon-Oudinot de 1988. La suite, reprise par l’Accord de Nouméa initié en 1998 devrait achever, par l’indépendance ou le maintien dans la France, la décolonisation décrite dans le préambule de ce même Accord. Les liens nouveaux ou anciens que la Nouvelle-Calédonie tisse avec les États et territoires du Pacifique participent à ce processus.

 1) Dans le cadre de l’Accord de Nouméa

Les dispositions de la loi organique de 1999 prévoient une ouverture de la Nouvelle-Calédonie à sa région, dans le cadre des compétences qui lui sont données, en attendant le transfert éventuel des compétences régaliennes, qui permettrait à la Nouvelle-Calédonie l’accès à un statut international de pleine responsabilité et l’organisation de la citoyenneté en nationalité. Une réponse positive au référendum sur le transfert de la France à la Nouvelle-Calédonie de ces compétences régaliennes équivaudrait à la pleine souveraineté c’est-à-dire à l’indépendance. Cela participe à la décolonisation tardive et inachevée de l’Océanie insulaire, qui confère au Pacifique une place privilégiée d’expérimentation de différents statuts politiques.

 2) La NC siège du Secrétariat général de la Communauté du Pacifique

La Communauté du Pacifique, compte 26 membres, les 21 États et territoires du Pacifique insulaire auxquels s’ajoutent l’Australie, la Nouvelle-Zélande, les États-Unis, la France et le Timor oriental. Anciennement appelé CPS, Commission du Pacifique Sud, sous l’influence des puissances occidentales lors de la Seconde Guerre mondiale, cette organisation régionale est la plus importante au point de vue du nombre de ses membres mais surtout dans les différents domaines qui sont abordés pour le développement des petits États et territoires du Pacifique. Le siège de Nouméa abrite aussi des institutions spécialisées de la Communauté du Pacifique.

  3) La Nouvelle-Calédonie et le FORUM du Pacifique

Le Forum est l’organisation politique régionale la plus importante, qui regroupe les États du Pacifique qui ont un statut de pleine souveraineté, autrement dit qui sont indépendants. Le FIP (Forum des îles du Pacifique) était anciennement appelé Forum du Pacifique sud. Il regroupe 16 membres, 14 petits États insulaires auxquels s’ajoutent l’Australie et la Nouvelle-Zélande. La Nouvelle-Calédonie est membre
« observateur » tout comme la Polynésie française, Wallis-et-Futuna et le Timor oriental. L’Australie, principal bailleur de fonds de l’organisation, soutient la candidature de la Nouvelle-Calédonie comme membre à part entière du Forum.

 4) Le Groupe mélanésien du Fer de lance

La Nouvelle-Calédonie n’est pas directement membre, mais demande officiellement son intégration. Cette organisation mélanésienne comprend 4 États (PNG, Salomon, Vanuatu, Fidji) et l’organisation politique nationaliste du FLNKS. C’est le FLNKS qui est membre à part entière, car l’histoire de cette organisation est directement liée à la lutte du peuple kanak pour son indépendance, dans les années 1985-1986, et qui a trouvé dans ses frères mélanésiens le moyen de se faire entendre dans les instances internationales comme dans le comité de décolonisation de l’ONU ou dans le Forum du Pacifique.

 5) Les autres organisations régionales

La Nouvelle-Calédonie participe aussi à plusieurs organisations régionales qui permettent aux petits États insulaires et territoires d’Océanie de se retrouver ensemble pour mettre en avant la solidarité et l’identité océanienne comme le Festival des Arts du Pacifique ou les Jeux et mini-jeux du Pacifique. Dans d’autres domaines, la Nouvelle-Calédonie est aussi membre d’organisations comme la SIDS (Small Island Developing States), la SOPAC (Commission de Géoscience appliquée du Pacifique Sud), le SPRED (Programme régional environnemental du Pacifique Sud), la FFA (agence des pêches du Forum du Pacifique), la PINA (Pacific Islands News Association)…
Les enjeux et les défis qui se posent à la Nouvelle-Calédonie aujourd’hui, sont nombreux et divers. L’approche de la sortie de l’Accord de Nouméa, suppose des acteurs politiques une maturité certaine pour éviter un retour des contentieux historiques qui ont été à l’origine d’un état insurrectionnel en Nouvelle-Calédonie. D’autres défis se posent comme celui de l’environnement avec la montée des eaux, qui a déjà produit les premiers réfugiés climatiques dans le Pacifique, et la mise en route de deux nouvelles usines de production de nickel questionne aussi la véritable capacité de petits pays face aux multinationales.


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26 décembre 2015
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