La Nouvelle-Calédonie de 1945 à 1999

Coloniale Professionnel Troisieme Terminale

Mis à jour le lundi 17 mars 2025 , par Luc STEINMETZ

Cette étude sur la Nouvelle-Calédonie de 1945 à 1999 a été au départ conçue pour les
professeurs de 3e des collèges. C’est la raison pour laquelle le commentaire et les
orientations qui suivent situent cette étude par rapport au programme adapté de 3e.

Mais il s’avère que cette question est aussi du programme d’autres classes. Ainsi la mise
au point scientifique peut être utilisée en lycée général et technologique (en terminales
L - ES - S ; en 1ère STI – STL - SMS) et en lycée professionnel (en 3e DP, 3e
préparatoire, 2e année de CAP D et en terminale BEP).

Thème : La Nouvelle-Calédonie depuis 1945 (3 heures)

Commentaire dans le programme adapté de 3ème : « On montre que la Nouvelle-Calédonie
est concernée par le débat sur la décolonisation. On évoque la fin de la colonie et la mise en
place du statut de territoire d’outre-mer. On insiste sur l’élargissement de la citoyenneté
française à toute la population de la Nouvelle-Calédonie.
Les essais d’autonomie, l’émergence du mouvement indépendantiste et les reprises en main
par l’État sont abordés sans entrer dans une étude exhaustive des différents statuts.
On présente la rupture des « événements » et on montre comment le drame d’Ouvéa a conduit
au règlement négocié de la question calédonienne par les Accords de Matignon.
On montre la recherche d’une solution consensuelle et son aboutissement avec l’Accord de
Nouméa et la loi organique du 19 mars 1999.
N.B. Les institutions de la Nouvelle-Calédonie seront traitées en Éducation civique
(2 heures).

Notions-clés : colonie ; Territoire d’outre-mer (TOM) ; Conseil général ; Assemblée
territoriale ; Gouverneur ; Haut-Commissaire ; autonomie ; statut de droit particulier ; collège
unique ; double collège ; spécialité législative ; commissions régionales ; commissions
municipales ; loi-cadre ; IKS ; autodétermination ; réforme foncière ; les « événements » ; La
table-ronde de Nainville-les-Roches ; Top 84 ; indépendance-association ; mission du
dialogue ; Accords de Matignon ; Accords Oudinot ; provincialisation ; solution
consensuelle ; Accord de Nouméa ; statut coutumier ; loi organique ; consultation d’accès à la
pleine souveraineté ; compétences régaliennes.

ORIENTATIONS

L’étude qui suit a pour but de donner aux
professeurs des pistes et des éléments qui leur
permettront, dans le respect de leur liberté
pédagogique, de bâtir un cours qui répondra
aux recommandations ci-dessus, mais il ne
saurait en aucun cas être un cours « clé en
mains ».

La question de programme « La Nouvelle-
Calédonie depuis 1945 » s’insère dans la
deuxième séquence d’histoire du bloc IV « La
France et la Nouvelle-Calédonie » du 3e
trimestre. On a intérêt à placer ce chapitre
avant celui d’éducation civique consacré aux
institutions actuelles de la Nouvelle-Calédonie
telles qu’elles résultent de l’Accord de
Nouméa et de la Loi organique.

L’histoire de la Nouvelle-Calédonie de 1945 à
nos jours est d’abord celle de la fin de l’époque
coloniale mais elle révèle en même temps,
surtout dans sa période la plus récente, celle
d’une incapacité à mettre en œuvre un statut
institutionnel stable qui tienne compte des
multiples particularités de l’entité néo-
calédonienne, ce qui a favorisé l’émergence de
la revendication d’indépendance kanak au
milieu des années 1970.

Après l’âge d’or et le choc de la modernité
qu’a constitué la Seconde Guerre mondiale, la
fin de la colonie et la naissance du Territoire
d’outre-mer font naître l’espoir d’une société
unifiée. Mais la période 1958-1975 apparaît
comme celle des occasions manquées. Elle
débouche sur la montée des tensions qui avec
les « événements » aboutit à une fracture qui
aurait pu être définitive. Mais la sagesse
semble l’emporter avec la paix retrouvée des
Accords de Matignon et la solution
consensuelle de l’Accord de Nouméa. On parle
alors de « destin commun », « d’avenir
partagé » pour que cessent les déchirures qui
ont tant meurtri la Nouvelle-Calédonie et
retardé son développement.

Pour étudier la Nouvelle-Calédonie depuis
1945 en respectant les instructions du
programme adapté, on doit distinguer cinq
périodes :

  • La 1ère est celle de l’après-guerre : elle va de 1945 à 1956 et correspond à celle de la fin de la colonie et du début du TOM. 
  • La 2e, qui va de 1956 à 1975 voit la Nouvelle-Calédonie faire des expériences diverses de l’autonomie qui n’empêchent pas l’émergence du mouvement indépendantiste.
  • La 3e qui va de 1975 à 1981 est celle de la politique réformatrice que mène l’État pour contrer, sans succès, la revendication indépendantiste.
  • La 4e est celle de la fracture et des « événements ». Elle commence en 1981 et s’achève sur les Accords de Matignon de 1988.
  • La 5e période est celle de la solution consensuelle et de l’acte fondateur de l’avenir de la Nouvelle-Calédonie : c’est le temps de l’Accord de Nouméa.

C’est volontairement que l’étude
s’arrête en 1999, pour éviter les
risques qu’une histoire trop immédiate
aurait comportés si elle avait dû aller
jusqu’en 2004.

Tout au long de cette étude, on a évité d’être
trop « événementiel » et on s’est efforcé d’être
le plus possible « notionnel ». L’étude
exhaustive des différents statuts a été évitée.
On n’a pas non plus étudié les institutions
mises en place par la Loi organique de 1999
puisqu’il est précisé que celles-ci doivent être
traitées en éducation civique.
Des annexes et un support documentaire
accompagnent l’étude scientifique. Les
annexes ont pour but d’approfondir certains
points de cette étude.

Il reste aux professeurs utilisateurs de cette
étude à bâtir leur cours en créant leur propre
problématique et en la complétant, si
nécessaire, par le support documentaire et
bibliographique qui l’accompagne ou par tout
autre document qu’ils jugeront plus adapté à la
question de programme.

MISE AU POINT SCIENTIFIQUE

De l’après-guerre aux temps difficiles des « événements » des années 1980 et à la paix
retrouvée des années 1990, l’histoire de la Nouvelle-Calédonie a été marquée par une
évolution complexe.

Cinq périodes sont à distinguer :

  • Après la Deuxième Guerre mondiale, la Nouvelle-Calédonie change de statut et devient un TOM (1945 – 1956).
  • L’expérimentation de l’autonomie (1957 – 1975).
  • Des réformes pour contrer la revendication indépendantiste (1975-1981).
  • Des « événements » à la paix retr ouvée des Accords de Matignon (1981 – 1988).
  • L’élaboration de la solution consensuelle et l’Accord de Nouméa (1989 – 1999).

1ère période – L’après-guerre : la fin de la colonie et les débuts du Territoire d’outre-mer.

Des changements fondamentaux interviennent après la Seconde Guerre mondiale. En 1946 la
Nouvelle-Calédonie cesse d’être une colonie et elle obtient le statut de territoire d’outre-
mer (TOM). Les Mélanésiens jusqu’alors sujets français deviennent citoyens français et
obtiennent progressivement le droit de vote en même temps qu’ils cessent d’être régis par le
code de l’indigénat.

1° La sortie du régime colonial

En devenant un TOM, la Nouvelle-Calédonie sort d’un régime colonial où seuls les
Européens nationaux et citoyens français avaient le droit de vote. Elle sort aussi d’un état
d’écart permanent de législation entre la métropole et la colonie. En effet, sous le régime
colonial, les règles juridiques applicables à la Nouvelle-Calédonie étaient le plus
fréquemment différentes de celles de la Métropole. Avec le statut de TOM, les lois votées par
le Parlement à Paris s’appliquent à la Nouvelle-Calédonie dès lors qu’elles interviennent dans
les matières où l’État est compétent et à condition qu’elles mentionnent expressément qu’elles
y sont applicables : c’est ce principe dit de « spécialité législative » qui différencie un
territoire d’un département d’outre-mer. Le Territoire est lui même compétent dans un vaste
domaine (dont la fiscalité fait partie) et dans lequel l’assemblée locale élue, le Conseil
Général, vote des délibérations. L’exécutif est assuré par le Gouverneur, représentant de
l’État. La seule application du principe de spécialité législative fait des TOM et de la
Nouvelle-Calédonie en particulier une collectivité semi-autonome.

Annexe 1 – Les institutions publiques en Nouvelle-Calédonie de 1946 à 1999

2° Les « sujets indigènes » deviennent citoyens français.

En devenant citoyens français, les Mélanésiens obtiennent le droit de vote. Mais cet accès à la
citoyenneté politique se fait par étapes entre 1945 et 1957, année où ils deviennent électeurs
dans les conditions du droit commun. L’accès des Mélanésiens au droit de vote et leur
participation à la vie démocratique sont encadrés par les Églises qui craignent que ces
nouveaux électeurs ne soient la proie du parti communiste de Nouvelle-Calédonie créé en
1946. Dès 1946 sont fondées, par les catholiques l’UICALO (Union des indigènes
calédoniens amis de la liberté dans l’ordre) et par les protestants l’AICLF (Association des
indigènes calédoniens et loyaltiens français).

Annexe 2 – L’UICALO et l’AICLF. Voir aussi annexes 10 – 3 ; 10 – 4 ; 10 – 5 ; 10 – 6 et 10 - 7

Malgré les demandes de faire voter les Mélanésiens dans un collège électoral particulier, le
Gouvernement de la République a maintenu le principe du collège unique contre les partisans
du double collège.

Annexe 3 – Le double collège

Dès 1946, la fin du code de l’indigénat entraîne la suppression pour les Mélanésiens des
restrictions aux libertés de résidence, de travail et de circulation, des prestations et des autres
sanctions propres à ce régime. Mais cette égalité n’est pas allée jusqu’à soumettre les
Mélanésiens au droit civil français, ce qui aurait entraîné la fin de l’organisation coutumière.
La Constitution de 1946 a reconnu et garanti un statut de droit particulier qui a permis aux
Mélanésiens de continuer à être régis par la coutume pour tout ce qui touche à l’état civil, au
mariage, à la filiation, à la propriété et aux successions.

3° La prise en compte démocratique de toute la population.

L’accession de la Nouvelle-Calédonie au statut de TOM lui permet d’être représentée au
Parlement de la République, à l’Assemblée Nationale par un député, Roger Gervolino et au
Conseil de la République par un sénateur, Henri Lafleur.

En 1951, Maurice Lenormand est élu député. Il fonde en 1953, à partir de l’UICALO et de
l’AICLF, l’Union calédonienne dont la devise est « deux couleurs, un seul peuple ». Ce parti
va vite devenir la force politique dominante du Territoire.

L’organisation municipale connaît aussi des transformations. En 1947 sont instituées les
commissions régionales qui sont le pendant en milieu mélanésien des commissions
municipales qui n’existaient que dans les centres à population européenne notable.

2e période - Les expériences de l’autonomie et l’émergence du mouvement indépendantiste (1956 – 1975).

1° La loi-cadre : l’autonomie renforcée.

En 1956, la France réorganise ses rapports avec son Outre-Mer par la loi-cadre dite loi
Defferre. Les responsabilités confiées aux TOM sont accrues. Pour la Nouvelle-Calédonie, le
décret 57-811 permet l’application de la loi-cadre. Elle se traduit par la transformation du
Conseil général en Assemblée Territoriale. L’exécutif du Territoire échappe désormais au
seul Gouverneur pour être confié à un organe collégial, le Conseil de gouvernement présidé
par le Gouverneur mais dont le chef réel est le Vice-président élu par l’Assemblée
Territoriale, qui dirige ses 6 collègues qui portent le titre de ministres, et qui a autorité sur les
services administratifs du Territoire. Par sa majorité à l’Assemblée Territoriale et avec le
Conseil de gouvernement, l’UC exerce une hégémonie sur la vie politique calédonienne.

Annexe 1 - déjà citée. Voir aussi annexe 10 - 2

2° Le double choix de 1958.

En 1958, le changement de République en France a des répercussions sur l’avenir
institutionnel des TOM et donc de la Nouvelle-Calédonie. De la réponse qu’elle donne au
référendum constituant dépend le maintien de la Nouvelle-Calédonie au sein de la République
ou son indépendance immédiate. Le 28 septembre 1958, les Calédoniens se prononcent à
98 % en faveur de la Constitution de 1958 ce qui a pour effet le maintien de la Nouvelle-
Calédonie au sein de la République. La Constitution de 1958 offre de plus aux territoires
d’outre-mer le choix entre le maintien du statut de TOM, l’accès à celui de département
d’outre-mer ou l’indépendance comme État membre de la Communauté. Ce choix doit être
opéré par l’Assemblée Territoriale. Par un vote de son Assemblée Territoriale, la Nouvelle-
Calédonie choisit le 17 décembre 1958 de garder son statut de TOM. 

3° La loi Jacquinot et les lois Billotte : le recul de l’autonomie.

Mais l’organisation administrative de l’autonomie et la pratique du pouvoir par l’UC ne font
pas l’unanimité dans la population calédonienne. L’UC souhaite renforcer cette autonomie.
L’opposition à l’UC redoute que cette autonomie ne conduise progressivement à
l’indépendance. Cette dernière crainte est aussi partagée par l’État. D’ailleurs les relations
entre le Gouvernement de la République et l’UC se détériorent. Cette dernière est à partir de
1960 affaiblie par des exclusions et des défections.

L’autonomie de la loi-cadre est réduite en deux étapes :

La loi Jacquinot du 21 décembre 1963 supprime les ministres. Le Conseil de gouvernement
n’a plus qu’un rôle consultatif auprès du Haut-Commissaire. Les compétences de l’État sont
accrues (ainsi l’enseignement secondaire public devient une compétence de l’État en 1965).

Annexe 1 – Déjà citée

Deux lois Billotte de 1969 limitent les libertés locales dans les domaines de la mine et de la
fiscalité. Une troisième loi Billotte crée les communes sur l’ensemble de la Nouvelle-
Calédonie : c’est la fin de la distinction entre commissions municipales et régionales.

Annexe 4 – Les lois Billotte. Voir aussi annexe 10 - 9

Les reculs de l’autonomie s’accompagnent d’une perte d’influence de l’UC qui doit céder en
1973 la présidence de l’Assemblée Territoriale et d’un développement des idées
indépendantistes. Nidoish Naisseline crée en juillet 1969 avec d’autres intellectuels kanak les
« Foulards rouges ». En 1971 est fondé par Élie Poigoune le « Groupe 1878 » (en référence à
l’année de la révolte kanak menée par le chef Ataï) qui s’inscrit dans la lutte pour
l’indépendance kanak. En 1975 est créé un comité d’action pour l’indépendance qui
comprend des élus de l’Union multiraciale et des élus mélanésiens de l’UC que l’électorat
européen a presque totalement abandonnée.
La tenue à Nouméa en septembre 1975 du festival culturel Mélanésia 2000 a été l’occasion
d’une affirmation identitaire du monde kanak et de la mise sur le devant de la scène du
principal organisateur de cette manifestation, Jean-Marie Tjibaou.

Annexe 5 - Jean-Marie Tjibaou

4° Des transformations économiques et sociales importantes

Dans le même temps, la Nouvelle-Calédonie connaît des progrès sociaux et économiques
importants, qui la font sortir de l’endormissement de la période coloniale et entrer vraiment
dans le XXe siècle.

Annexes 10 – 1 et 10 – 8

Le pays se modernise grâce aux grands travaux (barrage de Dumbéa et de Yaté). D’autres
chantiers, comme la construction d’une nouvelle aérogare à Tontouta, sont ouverts et
permettent de mettre en place des équipements structurants qui progressivement font entrer la
Nouvelle-Calédonie en général mais particulièrement la Brousse et les Iles Loyauté dans l’ère
du progrès. Ces chantiers sont divers : écoles, dispensaires, amélioration des routes,
électrification des villages, adductions d’eau, aménagements portuaires etc. Ils ont été
l’amorce d’un rééquilibrage dont l’urgente nécessité se faisait sentir. Ces travaux ont été
possibles grâce surtout à l’aide de l’État par le biais du FIDES (Fonds d’investissement pour
le développement économique et social, créé le 18 avril 1946) et dans une moindre mesure
aux efforts du budget local.
Mais c’est aussi le début de l’exode rural (Européens et Mélanésiens commencent à quitter la
Brousse ou les Îles Loyauté pour Nouméa). L’immigration polynésienne (Tahitiens,
Wallisiens et Futuniens) commence réellement. La protection sociale se met en place avec la
création de la CAFAT.
Pendant cette période, le niv eau de vie des Calédoniens s’accroît considérablement. La
télévision fait ses débuts en 1965. On se rue vers l’automobile : 3 000 ventes en 1968.
En décembre 1966, les deuxièmes jeux du Pacifique sont organisés à Nouméa. Le
financement de l’État permet la réalisation de nombreux équipements sportifs à Nouméa.
L’amélioration de la desserte aérienne avec l’entrée en service des avions à réaction (les jets)
à partir de 1961 facilite les échanges avec l’extérieur, en particulier avec la Métropole
désormais à 32 h de Nouméa.
En 1966, les Mélanésiens, qui ont gardé le statut coutumier (on disait alors le statut de droit
particulier) doivent désormais faire enregistrer leurs mariages dans les mairies.
De 1969 à 1972, c’est le « boom » : le Territoire connaît une formidable expansion
économique basée sur le nickel. Les prévisions de production fondées sur le cours du métal en
hausse constante permettent d’envisager des usines métallurgiques nouvelles : on parle déjà
d’usine du Nord, d’usine du Sud. Cette expansion s’accompagne d’une forte immigration
(5000 Européens, 5000 Polynésiens). Des fortunes s’édifient rapidement, des infrastructures
se développent (Cités Pierre Lenquette, de Magenta, de Tindu ...), ponts sur la côte Est
(financés par le FED, Fonds européen de développement), etc.
Mais l’expansion du nickel s’essouffle à partir de 1973. Les projets de nouvelles usines sont
abandonnés. La récession économique s’accentue en 1974 et elle entraîne faillites et chômage.
Le boom qui s’achève a contribué à accroître le déséquilibre entre Nouméa qui s’est enrichie
et la « Brousse », restée à l’écart.

Annexes 7 et 9 – Les transformations économiques de la Nouvelle-Calédonie de 1969 à 1997

La croissance démographique de la Nouvelle-Calédonie

3e période - Une politique réformatrice pour contrer la revendication indépendantiste (1975 – 1981).

1° La fracture politique s’affirme

La récession économique a rendu plus aigus les problèmes politiques et a accentué la
radicalisation du sentiment indépendantiste chez les Kanak. En mai 1976 est fondé le Palika
(Parti de libération kanak). L’UC se rallie à l’indépendance kanak socialiste (l’IKS) le 21 mai
1977, lors de son VIIIe congrès à Bourail, ce qui provoque de nouveaux départs de militants
en particulier parmi ses derniers adhérents européens. Le 4 juin 1979, le Front indépendantiste
(FI) est créé : il regroupe l’UC, le FULK (Front uni le libération kanak), le PSC (Parti
socialiste calédonien), l’UPM (Union progressiste mélanésienne) et le Palika. Jean-Marie
Tjibaou, de l’UC, apparaît sur le devant de la scène politique.
En avril 1977, Jacques Lafleur fonde le RPC (Rassemblement pour la Calédonie) qui devient
RPCR en juillet 1978 : il regroupe la plupart des anti-indépendantistes, désormais majoritaires
en Nouvelle-Calédonie, comme le confirment le résultat des élections territoriales de
septembre 1977, et encore l’élection de Jacques Lafleur à la députation en mars 1978 contre le
député sortant, Roch Pidjot de l’UC.

Annexe 6 - Jacques Lafleur

2° La politique réformatrice de l’État

À partir de 1976, le Gouvernement de la République (Valéry Giscard d’Estaing a été élu
Président de la République en mai 1974) entreprend en Nouvelle-Calédonie une politique
résolument réformatrice avec l’espoir de désamorcer la revendication indépendantiste. Les
réformes sont statutaires, économiques et sociales.

Le statut Stirn du 28 décembre 1976 accroît l’autonomie du Territoire. L’administration est
placée sous la double autorité du représentant de l’État, le Haut-Commissaire, et d’un Conseil
de gouvernement élu à la proportionnelle puis au scrutin majoritaire à partir de 1979.

Le gouvernement compte aussi sur des réformes structurelles et le développement
économique pour contenir la progression des idées indépendantistes. Le secrétaire d’État aux
DOM-TOM Paul Dijoud annonce en février 1979 un « plan de développement économique et
social à long terme pour la Nouvelle-Calédonie » et affirme sa volonté de régler le problème
foncier dans la perspective des droits historiques des communautés mélanésiennes. Le plan
Dijoud est adopté par l’Assemblée Territoriale sans les voix de l’UC. Mais cette politique
réformatrice (la réforme foncière est même jugée audacieuse) n’est pas entendue par le FI
qui envoie une mission à l’ONU pour défendre sa cause auprès du comité de décolonisation et
à Paris pour rencontrer le PS et le PCF. Ces deux dernières rencontres aboutissent à des
déclarations communes FI-PS et FI-PCF sur l’autodétermination de la Nouvelle-Calédonie
et vont dans le sens du programme commun de gouvernement PS-PCF qui en 1972
mentionnait les DOM-TOM dans la rubrique « politique étrangère ».

Annexe 1 – Déjà citée

4e période - Les temps difficiles : des « événements » aux Accords de Matignon (1981 - 1989).

1° Les espoirs et les craintes des forces politiques en présence.

L’arrivée au pouvoir de la gauche à Paris en mai 1981 suscite des espoirs chez les
indépendantistes kanak, qui y ont d’ailleurs contribué en votant pour François Mitterrand.
L’UC avait fait campagne avec ce slogan : « Mitterrand = Indépendance kanak socialiste » et
François Mitterrand avait recueilli 35.5 % des suffrages au 2e tour en Nouvelle-Calédonie.
Mitterrand élu, les indépendantistes espèrent que la gauche de gouvernement tiendra les
promesses de la gauche d’opposition. La 58e proposition du candidat Mitterrand incluait la
possibilité de l’indépendance des TOM à condition que celle-ci soit décidée en vertu du
principe d’autodétermination.
La nouvelle donne politique métropolitaine crée un choc dans le camp des anti-
indépendantistes, alors que l’application de la réforme foncière sur le terrain suscite des
tensions et des violences.
C’est dans ce contexte que le secrétaire général de l’UC, Pierre Declercq est assassiné en
septembre 1981. Cet assassinat ne sera jamais élucidé. Mais il marque le début des troubles
graves qui vont agiter la Nouvelle-Calédonie jusqu’en 1989. Les indépendantistes kanak
réagissent par des barrages routiers, lesquels provoquent des contre manifestations d’anti-
indépendantistes (à Koné en octobre 1981, à Nouméa le 11 novembre de la même année où
20.000 manifestants, toutes ethnies confondues, se mobilisent contre l’indépendance).

2° Les indépendantistes au pouvoir.

Le nouveau Haut-Commissaire, le député socialiste en mission Christian Nucci, organise une
nouvelle majorité territoriale en installant les indépendantistes au pouvoir grâce à un
renversement d’alliance : la FNSC (Fédération pour une nouvelle société calédonienne) qui
s’était faite élire sur un programme anti-indépendantiste en 1979 et qui gouvernait depuis
alliée au RPCR, s’associe en 1982 au FI pour former un nouveau gouvernement dont Jean-
Marie Tjibaou devient Vice-président.
Le but du pouvoir socialiste est double : faire participer les indépendantistes aux institutions
et faire réaliser par la nouvelle majorité FI-FNSC à l’Assemblée Territoriale des réformes
dans les domaines de la compétence du Territoire (c’est ainsi que l’impôt sur le revenu a été
institué en Nouvelle-Calédonie) en complément de celles qu’il engage par ordonnances dans
les domaines de la compétence de l’État (notamment en renforçant les outils juridiques et
financiers de la réforme foncière).
Sur le terrain, la situation se dégrade : manifestations diverses des deux camps, attaques
indépendantistes contre des gendarmes (Touho, Koindé en janvier 1983).

3° La table ronde de Nainville-les-Roches.

Cette dégradation de la situation pousse Georges Lemoine, secrétaire d’État aux DOM-TOM,
à convoquer en juillet 1983 à Nainville-les-Roches une « table ronde » sur l’évolution de la
Nouvelle-Calédonie. Elle regroupe les parlementaires du Territoire (tous RPCR), des
représentants du FI, du RPCR et de la FNSC.
La déclaration commune de Nainville-les-Roches est adoptée par le FI et la FNSC. Elle relève
« la volonté commune des participants de voir confirmer définitivement l’abolition du fait
colonial » et prévoit de mettre en place un statut d’autonomie interne de nature à préparer une
démarche d’autodétermination de la Nouvelle-Calédonie. Le peuple kanak se voit reconnaître
un droit inné et actif à l’indépendance dont l’exercice doit se faire dans le cadre de
l’autodétermination ouverte également pour des raisons historiques aux autres ethnies dont la
légitimité est reconnue par les représentants du peuple kanak.

Annexe 8 – Nainville-les-Roches . Voir aussi annexe 10 – 11

4° La large autonomie du statut Lemoine.

Annexe 1 – Déjà citée

Après cette table ronde un nouveau statut est préparé puis voté en mai 1984 par la seule
Assemblée nationale à majorité de gauche (le Sénat a voté contre et localement, l’Assemblée
Territoriale, consultée pour avis a également rejeté à l’unanimité le statut Lemoine). Ce statut
prévoit de confier l’exécutif à un gouvernement composé de ministres nommés par son
président lui-même élu par l’Assemblée Territoriale et responsable avec ses ministres devant
elle. En même temps est mise en place une représentation coutumière avec la création de 6
pays coutumiers et un comité État-Territoire pour préparer un scrutin d’autodétermination.
Les anti-indépendantistes rejettent ce statut car ils redoutent l’ambiguïté de
l’autodétermination. Les indépendantistes le condamnent car d’une part le gouvernement
socialiste a refusé de réduire le corps électoral pour le scrutin d’autodétermination et d’autre
part, sauf à remettre en cause le suffrage universel, ce statut ne pouvait bénéficier qu’aux anti-
indépendantistes représentant environ les deux tiers de l’électorat calédonien.
La rupture entre les indépendantistes et les socialistes était consommée et n’allait pas tarder à
éclater au grand jour.

5° TOP 84.

Le FI lance l’opération TOP 84 (mot d’ordre pour exiger l’indépendance dès 1984), décide le
« boycott actif » des élections prévues pour la mise en place du statut Lemoine. Le 24
septembre 1984 le FI se transforme en FLNKS.
Le 18 novembre, les élections se déroulent dans la violence. Le FLNKS met en œuvre le
boycott actif des élections. Éloi Machoro brise à coup de hache une urne à Canala et met le
feu aux documents électoraux : cette scène devient le symbole du début des « événements ».
Le boycott se traduit aussi par des barrages routiers, des occupations de bureaux de vote, des
heurts nombreux et violents avec les forces de l’ordre. Le boycott empêche environ 20 % des
électeurs (surtout en milieu mélanésien) d’aller voter. L’Assemblée Territoriale issue de ces
élections comprend 34 élus RPCR, 6 du LKS(Libération kanak socialiste), 1 de la FNSC (qui
est ainsi condamnée par son électorat) et 1 du FN (Front national). Un gouvernement RPCR
présidé par Dick Ukeiwë est mis en place.

Mais les troubles se poursuivent. La situation échappe au contrôle de l’État. Thio est assiégée
par les troupes d’Éloi Machoro.
Le 1er décembre 1984, le FLNKS met en place un gouvernement provisoire de Kanaky.

Annexes 10 – 12 ; 10 – 13 et 10 – 14 : le temps des « événements »

6° Le plan-Pisani d’indépendance-association.

Edgard Pisani devient Haut-Commissaire. Dès son arrivée en Nouvelle-Calédonie, il
proclame sa volonté de rétablir l’ordre et de rechercher par le dialogue une solution
institutionnelle à la crise. Il suggère que les Calédoniens se prononcent en faveur de
« l’indépendance-association » en application de l’article 88 de la Constitution.
Mais la violence ne faiblit pas. Partout sur le Territoire se développe une ambiance de guerre
civile : assassinats, embuscades( à Hienghène une fusillade en réponse à des incendies de
maisons fait 9 morts originaires de la tribu de Tiendanite, parmi lesquels deux frères de Jean-
Marie Tjibaou), attentats, émeutes, état d’urgence, couvre-feu avec son cortège de
destructions, de haine et de deuils : maisons incendiées, expulsions d’adversaires de
l’indépendance de la côte Est et des Loyauté, assassinat du jeune Yves Tual suivi de la
« neutralisation » d’Éloi Machoro alors « ministre de l’intérieur » du gouvernement
provisoire de Kanaky qui, avec ses hommes, s’apprêtait à s’emparer de La Foa.
Ces troubles sont les révélateurs d’une radicalisation et d’une bipolarisation marquées de la
population, mais aussi de la complexité de la crise calédonienne. Tous les Kanak n’étaient pas
indépendantistes et bon nombre d’entre eux récusaient ces violences même s’ils partageaient
les idées indépendantistes. Les autres communautés, parmi lesquelles de nombreux « métis »
faisaient majoritairement bloc contre les indépendantistes.

Un conseil des ministres à Paris décide de reporter à la fin 1987 l’organisation d’un « scrutin
d’autodétermination en association avec la France ». Le plan Pisani d’indépendance-
association est rejeté par le FLNKS (congrès de Nakéty du 9 février 1985), par l’Assemblée
Territoriale (rejet après consultation pour avis sur le projet de loi du statut Pisani le 31 mai).
Seule la FNSC se déclare le 26 juin 1985 favorable à l’indépendance-association.
Le statut Pisani et les ordonnances de la fin 1985 organisent un régime transitoire qui doit
conduire au référendum d’autodétermination : création de 4 régions aux pouvoirs très larges,
retour du Haut-Commissaire comme exécutif du Territoire, implication forte de l’État dans un
processus de développement économique et social.
Mais à cause de la défaite de la gauche aux élections législatives de mars 1986, ce statut ne fut
pas longtemps appliqué.

Annexe 1 - Déjà citée

7° Vers le drame d’Ouvéa

Le gouvernement de Jacques Chirac définit avec Bernard Pons comme ministre de l’Outre-
Mer une politique en plusieurs volets : soutien du développement économique, rétablissement
de l’ordre, rééquilibrage des institutions au profit du Territoire, redécoupage des régions,
préparation du référendum d’autodétermination pour lequel est mise en place pour la première
fois une restriction du corps électoral (le gouvernement décide en effet que tous les électeurs
résidant depuis au moins 3 ans sur le Territoire pourront participer à ce scrutin). Pour sa part
l’UC lors de son congrès de Poya avait exigé l’exclusion des non-kanak du corps électoral
appelé à se prononcer au référendum d’autodétermination. Le référendum a lieu le 13
septembre 1987 : il est boycotté par le FLNKS qui annonce en même temps son refus de
participer aux institutions du statut Pons. Le résultat du référendum donne 98.3 % des
suffrages exprimés en faveur du maintien de la Nouvelle-Calédonie au sein de la République
avec une abstention de 41 % (soit 20 points de plus que l’abstention moyenne).
Mais l’incompréhension s’aggrave entre d’une part le gouvernement de la République et la
majorité loyaliste confortée dans sa légitimité confirmée par les urnes, et d’autre part le
FLNKS qui estime que sa légitimité historique ne saurait être remise en cause par un vote.
Les troubles se poursuivent et reprennent de plus belle à l’approche de l’élection
présidentielle de 1988. Prise d’otages de gendarmes à Poindimié, mais surtout double drame
d’Ouvéa : le 22 avril des militants FLNKS massacrent 4 gendarmes puis en retiennent en
otage 4 autres dans la grotte de Gossanah en espérant obtenir de l’État l’indépendance
immédiate. L’assaut donné par les forces de l’ordre pour libérer les otages fait 21 morts (19
du côté des preneurs d’otages et 2 du côté des militaires français).

8° Les Accords de Matignon de 1988 : la sortie de la logique conflictuelle.

Après la réélection de François Mitterrand, le nouveau Premier ministre Michel Rocard doit
faire face à une situation dégradée par le drame d’Ouvéa. Il décide d’envoyer sur place une
« mission du dialogue » pour précisément renouer le dialogue et dégager une solution au
problème calédonien.
Après des premiers contacts difficiles, la mission arrive à convaincre les indépendantistes et
les anti-indépendantistes (exceptés les plus radicaux des deux camps) qu’il n’y a pas d’autre
voie que la négociation. Celle-ci se noue à Paris en juin 1988 entre les délégations du RPCR
(conduite par Jacques Lafleur), du FLNKS (conduite par Jean-Marie Tjibaou), du LKS et du
gouvernement, Michel Rocard s’engageant lui-même personnellement dans la négociation.
La volonté de sortir de cette logique conflictuelle trouve sa concrétisation dans la signature
historique le 26 juin 1988 des Accords de Matignon (complétés le 20 août par les Accords
Oudinot). Ces accords contiennent plusieurs dispositions.

1. Large amnistie des crimes et délits de la période précédente ;

2. Administration directe par l’État pendant un an puis réforme statutaire (avec mise en
place de la provincialisation) ;

3. Efforts particuliers de l’État en faveur du développement économique et social et du
rééquilibrage ;

4. Scrutin d’autodétermination sur l’avenir du Territoire en 1998 avec un corps électoral
limité à ceux qui auront résidé en Nouvelle-Calédonie depuis 10 ans.

Le projet de loi mettant en œuvre les Accords de Matignon et l’organisation statutaire qui en
résulte n’est pas soumis au vote du Parlement mais à l’approbation du peuple français par un
référendum organisé le 6 novembre 1988. Le oui l’emporte par 80 % des suffrages exprimés,
mais l’abstention a été énorme (63 % sur l’ensemble français) ; en Nouvelle-Calédonie,
l’abstention n’est que de 37 % mais le oui n’obtient que 57 % des suffrages exprimés et le
non l’a emporté à Nouméa. Ces résultats locaux révèlent le peu d’enthousiasme du camp anti-
indépendantiste tandis que les dirigeants indépendantistes ont éprouvé des difficultés à
convaincre.

Le 4 mai 1989, lors de la cérémonie de levée de deuil à Ouvéa (un an après le drame de
Gossanah), les deux principaux dirigeants du FLNKS Jean-Marie Tjibaou et Yeweiné
Yeweiné sont assassinés par un militant indépendantiste, ancien membre du Palika, Djubély
Wéa qui ressentait les Accords de Matignon comme une trahison des objectifs et des militants
indépendantistes et qui avait fondé depuis peu un comité d’action anti-néo-colonialiste pour
s’opposer aux Accords de Matignon.

L’application des Accords de Matignon est positive. Outre le retour à la paix, élément
particulièrement appréciable, ils ont permis à une génération de Kanak d’être confrontée à
l’exercice et aux difficultés du pouvoir administratif dans les provinces. Des infrastructures
permettant un rééquilibrage au profit de l’intérieur et des îles ont été réalisées à un rythme
important. Les Kanak se sont davantage insérés dans le monde économique. 400 cadres ont
été formés, principalement kanak. La Nouvelle-Calédonie a rétabli des relations de bon
voisinage avec les pays et organisations du Pacifique Sud (notamment avec le Forum du
Pacifique) au point qu’elle n’est plus regardée comme un « résidu français de la colonisation »
mais au contraire citée comme exemple par des anciennes colonies devenues indépendantes.
Surtout l’idée d’une Nouvelle-Calédonie pluriethnique a gagné du terrain en milieu kanak
même si rien n’est définitivement acquis.

Annexe 1 - Déjà citée. Voir aussi annexe 10 – 15

5e période - L’Accord de Nouméa : la « solution consensuelle » pour un destin commun et un avenir partagé (1998-1999 ).

1° L’Accord de Nouméa ou la solution consensuelle

Les Accords de Matignon de 1988 prévoient qu’à l’issue d’une période de 10 ans, un
référendum d’autodétermination sera organisé en Nouvelle-Calédonie. Par sa question brutale,
pour ou contre l’indépendance, ce référendum risque de diviser les Calédoniens. Son issue
hostile à l’indépendance ne fait pas de doute et présente le risque de voir une partie des
indépendantistes renouer avec la violence, à l’origine des événements tragiques que le pays a
connus de 1984 à 1988.

Le RPCR avec Jacques Lafleur est le premier à penser à rassembler les Calédoniens autour
d’une « solution consensuelle » à faire adopter par référendum en remplacement du scrutin
d’autodétermination initialement prévu.
L’État et le FLNKS, les deux autres partenaires des Accords de Matignon d’abord étonnés, se
sont ralliés à cette idée de « solution consensuelle ».

En 1996, les discussions sur l’avenir de la Nouvelle-Calédonie se sont ouvertes sous le
gouvernement d’Alain Juppé, se sont poursuivies sous le gouvernement de Lionel Jospin et
ont abouti à la signature de l’Accord de Nouméa.

Le texte de l’Accord de Nouméa, acte politique fondateur de l’avenir de la Nouvelle-
Calédonie, été signé en deux temps :

- D’abord le 21 avril 1998 en conclusion de sa discussion, par les représentants des deux
principales familles politiques (RPCR et FLNKS) ainsi que par ceux du Gouvernement de la
République ;

 Puis d’une manière plus solennelle et officielle le 5 mai 1998, par le Premier ministre
Lionel Jospin, lors de sa venue à Nouméa, et par les dirigeants du RPCR et du FLNKS. C’est
ce 5 mai 1998 qui est retenu comme date officielle de l’Accord de Nouméa

Annexe 10 – 15 : la signature officielle de l’Accord de Nouméa

L’Accord de Nouméa a été soumis aux Calédoniens par référendum local le 8 novembre
1998. Il a été adopté par 72 % de oui contre 28 % de non (avec une participation de 74 %).

2° Les dispositions de l’Accord de Nouméa

L’Accord de Nouméa est composé d’un préambule et d’un document d’orientation.

Dans le préambule, la France exprime ses regrets pour les excès commis contre les Kanak
pendant la colonisation définie comme une période « d’ombres et de lumières ».
La décolonisation est reconnue comme le moyen de refonder un lien social durable entre les
communautés qui vivent en Nouvelle-Calédonie, en permettant au peuple kanak d’établir avec
la France des relations nouvelles.
Pour cela sont créés une citoyenneté de la Nouvelle-Calédonie (essentiellement définie par
une condition de résidence de 10 ans) et un partage de souveraineté avec la France, sur la voie
d’une émancipation progressive du pays avec, au terme de cette période, un référendum
d’accès à la pleine souveraineté (c’est-à-dire à l’indépendance).

Le document d’orientation traite d’abord de l’identité kanak.
Les réserves deviennent des terres coutumières. Le statut civil coutumier régira les droits
civils des Kanak (propriété, mariage, enfants, succession etc.). Un Sénat coutumier sera mis
en place avec un rôle consultatif. Le patrimoine culturel Kanak sera reconstitué, sauvegardé et
valorisé. Les terres coutumières seront cadastrées. Des signes identitaires du pays (nom,
drapeau, hymne, graphisme sur les billets de banque) seront recherchés en commun et décidés
par le Congrès (à une majorité des 3/5e pour le nom du pays) pour exprimer l’identité kanak et
le futur partagé entre toutes les communautés.

Le document d’orientation traite ensuite de l’organisation des institutions. L’architecture
des institutions résultant des Accords de Matignon est conservée.
La Nouvelle-Calédonie reste divisée en 3 provinces dont les assemblées, en se réunissant,
forment le Congrès (élu pour 5 ans) organe délibérant du pays. Le Congrès peut voter des
« lois du pays ». Seuls les citoyens de la Nouvelle-Calédonie (domiciliés depuis 10 ans en
Nouvelle-Calédonie à la date de l’élection) peuvent voter pour élire le Congrès et les
assemblées de provinces
L’exécutif de la Nouvelle-Calédonie n’est plus le Haut-Commissaire, représentant de l’État. Il
est transféré à un gouvernement collégial élu par le Congrès à la proportionnelle.

Annexe 1 - Déjà citée

L’Accord de Nouméa organise, sur la durée de 4 mandats de 5 ans du Congrès, un transfert de
compétences de l’État à la Nouvelle-Calédonie. Il en sera ainsi, à titre d’exemples, pour le
droit du travail, pour l’enseignement etc. Au terme de cette période, l’État ne détiendra plus
que les compétences « régaliennes » (défense, justice, maintien de l’ordre, monnaie, affaires
étrangères). L’Accord de Nouméa prévoit aussi un partage de compétences entre la Nouvelle-
Calédonie et l’État dans les relations internationales, régionales ou dans des secteurs
particuliers (comme la communication audiovisuelle, la desserte aérienne internationale,
l’enseignement supérieur, la réglementation minière).

L’État compensera financièrement par une dotation la prise en charge des compétences
transférées à la Nouvelle-Calédonie.

L’Accord de Nouméa prévoit de mieux faire accéder les Calédoniens aux emplois de
formateurs et de promouvoir l’accession des Kanak aux postes de responsabilité. L’État
soutiendra un programme de formation de cadres moyens et supérieurs.
Des contrats pluriannuels favoriseront le développement économique. Un schéma de mise en
valeur des richesses minières sera élaboré, tandis que la Nouvelle-Calédonie redeviendra
progressivement compétente en matière de droit minier.

Au plus tard en 2018, et peut-être à partir de 2014, les Calédoniens seront consultés sur le
transfert à la Nouvelle-Calédonie des compétences dites « régaliennes » que l’État aura
conservées, c’est-à-dire sur l’accession à l’indépendance de la Nouvelle-Calédonie. Le corps
électoral concerné par cette consultation d’accession à la pleine souveraineté comprend non
pas exactement les citoyens de la Nouvelle-Calédonie mais tous les citoyens français qui
pouvaient participer à la consultation de 1998, tous ceux qui sont nés en Nouvelle-Calédonie
ou qui s’y sont installés depuis 1994 à condition qu’ils y aient le siège de leurs intérêts
matériels et moraux, et les descendants devenus majeurs des uns et des autres.
Si la réponse à cette consultation est positive, la Nouvelle-Calédonie accédera au statut d’État
souverain, et la citoyenneté de la Nouvelle-Calédonie deviendra nationalité du nouvel État. Si
la réponse est négative après deux autres consultations, une nouvelle négociation entre les
partenaires politiques examinera la situation ainsi créée et cherchera une solution.

Pour mettre en oeuvre l’Accord de Nouméa, une révision de la Constitution était nécessaire
(car certains des points de l’Accord de Nouméa étaient contraires à la Constitution).
Cette révision est intervenue le 6 juillet 1998 à une très forte majorité du Congrès du
Parlement (95 % de oui).
L’Accord de Nouméa a été ensuite soumis à un référendum local (en remplacement du
référendum d’autodétermination initialement prévu en 1998). Ce référendum a eu lieu le 8
novembre 1998 et a recueilli 72 % de oui.

Puis, une loi organique a été votée par le parlement au début de 1999, pour mettre en pratique
les grands principes contenus dans l’Accord de Nouméa.
La loi organique est le nouveau statut de la Nouvelle-Calédonie, qui cesse d’être un TOM
mais reste une collectivité territoriale de la République, c’est à dire une portion du territoire
français s’administrant par des organes élus.

En mai 1999 les élections au congrès et aux assemblées de provinces ont permis la mise en
place des institutions issues de l’Accord de Nouméa.

Les Calédoniens sont conviés à être les bâtisseurs d’un destin commun et d’un avenir
partagé, par la pratique du consensus.

L’Histoire qui se construit et dont la politique est le moyen dira si le consensus dynamique
initié par les Accords de Matignon et conforté par l’Accord de Nouméa saura perdurer pour
les deux décennies qui suivent 1999 en évitant l’affrontement de deux projets de société qui
paraissent à priori inconciliables.
La première mandature de l’Accord de Nouméa qui s’est achevée en mai 2004 par le
renouvellement du Congrès et des Assemblées de province a vu :

 La pratique difficile de la collégialité au sein du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie
et finalement l’élimination du Rassemblement-UMP de la direction de ce gouvernement et de
l’exécutif de la province Sud au profit de l’Avenir ensemble, alors que le Rassemblement
reste en voix le premier parti politique calédonien. Dans le même temps les tensions vives
entre l’UC et le Palika font douter de la survie du FLNKS.

 la mobilisation des espoirs des populations et du personnel politique autour des projets
d’usine du Sud (Goro-Nickel) et du Nord (Koniambo-Vavouto), projets qui suscitent aussi des
craintes et des doutes.

 la constatation d’une forte croissance de la population mesurée par le recensement effectué
au dernier trimestre 2004, croissance qui aura été de 15 % depuis 1996, portant la population
de la Nouvelle-Calédonie à 236 000 habitants.

Annexes 7 et 9 – Pour avoir quelques éléments sur l’évolution économique et le
mouvement démographique en Nouvelle-Calédonie pendant les années 1990

++++

ANNEXES ET DOCUMENTS PHOTOGRAPHIQUES

Annexe 1 : LES INSTITUTIONS PUBLIQUES EN NOUVELLE-CALÉDONIE DE 1946 à 1999

D’après la « Présentation synthétique de l’histoire statutaire de la Nouvelle-Calédonie » par
Marianne Devaux – in « L’organisation de la Nouvelle-Calédonie – Institutions et régime législatif » -
CDP Nouméa Nouvelle-Calédonie – Collection Université – Tableau modifié ou complété
par Luc Steinmetz

Annexe 2 : La naissance de l’U.I.C.A.L.O. et de l’A.I.C.L.F.

Deux changements juridiques majeurs interviennent en Nouvelle-Calédonie après la Seconde Guerre
mondiale. La Nouvelle-Calédonie n’est plus une colonie, elle devient un Territoire d’Outre-mer
(T.O.M) ; les Indigènes deviennent des nationaux français à part entière par l’acquisition de la
citoyenneté (ils étaient jusqu’alors des sujets français) et acquièrent progressivement le droit de vote.
Dès janvier 1946, le parti communiste calédonien (P.C.C) est fondé par Jeanne Tunica Y Casas et
Florindo Paladini. Il se dote rapidement d’une section mélanésienne et se signale aux Indigènes par un
discours et une propagande en faveur des colonisés dans le droit fil de l’internationale communiste
(« la prise de Londres et de Paris passe par celle de Calcutta et de Saïgon »). Les Églises catholique et
protestante comprennent vite la nécessité d’encadrer l’accès des Indigènes à la vie démocratique avec
notamment le souci d’éviter que ces nouveaux électeurs ne deviennent la proie du PCC dont
l’idéologie matérialiste et athée est jugée dangereuse. C’est dans ce contexte que naissent deux
associations indigènes à base religieuse, la première catholique : l’Union des Indigènes Calédoniens
Amis de la Liberté dans l’Ordre (UICALO) et la deuxième protestante : l’Association des Indigènes
Calédoniens et Loyaltiens Français (AICLF).

1° L’Union des Indigènes Calédoniens Amis de la Liberté dans l’Ordre (UICALO)

1. La création de l’UICALO

L’UICALO est créée entre mai 1946 et mars 1947 à l’initiative du vicariat apostolique de Nouvelle-
Calédonie et de son évêque Mgr. Édouard Bresson avec l’aide de ses missionnaires (principalement le
père Luneau, à l’époque quasi-curé de Canala), des catéchistes et avec la participation active des
notables mélanésiens catholiques.
 Mai 1946 : un manifeste intitulé « Revendications » est adopté lors d’une grande réunion à l’évêché
de Nouméa. Il se réclamait d’un organisme nouvellement créé, l’UICALO. Ce mouvement se
présentait comme une riposte aux menées d’inspiration communiste et se référait à la devise de la
République française pour réclamer ce qui devait constituer (cf. infra) le programme de l’UICALO. Ce
manifeste était accompagné d’une carte d’adhésion. Ce document capital constitue la base de la
réflexion et de l’action ultérieures de l’UICALO. Il fut expédié dans toutes les tribus aux catholiques
comme aux protestants mais ces derniers, en raison de divergences secondaires créeront un
mouvement parallèle, l’AICLF.
 Mars 1947 : réunion à Païta de la première assemblée des délégués de l’Union pour approuver ses
statuts et élire son premier conseil d’administration (Roch Pidjot est élu président) avant la déclaration
officielle de l’association en avril 1947. L’adhésion à l’association est réservée uniquement aux
indigènes hommes ou femmes de la Nouvelle-Calédonie et dépendances.

2. Le programme de l’UICALO

Il est issu des vœux émis par l’assemblée de Païta. Il sera à l’origine des principales revendications
que l’Union défendra par la suite et s’articule autour des points suivants :
 Mise en place d’une représentation démocratique dans l’organisation tribale (conseil élu dans les
tribus, grand conseil élu dans les districts) ;
 Création d’une assemblée consultative indigène élue par les Indigènes eux-mêmes ;
 Maintien de la réserve indigène et de son statut ;
 Établissement d’un statut indigène garantissant les droits et les intérêts de chacun dans la tribu,
devant l’administration et auprès des employeurs ;
 Abolition des prestations et révision de l’impôt de capitation ;
 Intervention de l’administration pour réprimer les désordres dans les tribus liés notamment à
l’alcoolisme ;
 Développement des visites médicales en tribus et formation d’infirmiers et d’infirmières indigènes ;
 Soutien aux écoles libres.

Ce programme trouva un écho au Conseil général qui chargea le député et le conseiller de la
République d’alerter le gouvernement central sur la nécessité de créer un deuxième collège électoral,
de maintenir la structure tribale et de renforcer l’autorité des chefs coutumiers.
Tous les ans jusqu’en 1956, l’UICALO tint régulièrement ses assises pour préciser les dispositions de
son programme ou pour émettre des vœux dans le sens de ce programme. Mais après le décès en 1950
du père Luneau, le principal inspirateur de l’UICALO, puis avec la fin annoncée en 1956 du pontificat
de Mgr. Bresson qui l’avait soutenu, des dissensions internes apparurent au sein de l’association qui
évolua rapidement vers le domaine politique où l’Église ne pouvait la suivre sous peine de devenir
partisane. Ce fut la fondation du mouvement Union calédonienne où l’UICALO fut partie prenante,
son président Roch Pidjot devenant président du nouveau parti.
L’action de l’UICALO s’atténua par la suite, mais il reste qu’elle a écarté le danger communiste, incité
à des réformes utiles et formé une élite indigène parmi lesquels on peut citer Roch Pidjot, Michel
Kauma.

2° L’Association des Indigènes Calédoniens et Loyaltiens Français( AICLF)

1. La création de l’AICLF

Comme l’Église catholique et après elle, l’Église protestante se soucie en 1946 d’organiser
l’expression de la revendication mélanésienne dans le cadre de la nouvelle politique indigène du
pouvoir central et de contrer l’implantation du parti communiste dans les tribus. La mission
protestante crée à son tour une organisation communautaire mélanésienne à vocation sociale, l’AICLF
dont la première assemblée se tient à Tibarama en juin 1947. Cette assemblée a été préparée par des
pasteurs (principalement le pasteur Benignus) et des laïcs protestants indigènes (dont Kowi Bouillant
et Doui Matayo Wetta).
L’organisation de l’AICLF est calquée sur celle de l’Église, la plupart des paroisses sont en effet
doublées d’un comité AICLF. Sa direction est divisée en deux bureaux, un pour la Calédonie (Grande-
Terre), l’autre pour les Loyauté. L’adhésion est réservée aux Indigènes protestants adultes.

2. Le programme de l’AICLF

Ce programme s’intitule « Pensées de base de l’AICLF » ». Il fera l’objet de développements lors des
assemblées générales qui suivront l’assemblée constitutive de Tibarama. Ce programme se décline en
plusieurs orientations :
 Assurer l’unité du peuple indigène de Nouvelle-Calédonie pour le faire grandir sur la voie de la
liberté, de la vérité, de l’amour mutuel et de la paix ;
 Maintenir les réserves tout en les dotant des structures d’encadrement modernisées ;
 Renforcer la cellule familiale ;
 Assurer le développement social des tribus et encourager l’entraide familiale et le travail productif
tout en améliorant les conditions de travail des salariés ;
 Assurer le partenariat avec la haute-administration pour permettre aux Indigènes « enfants de la
France » de demeurer sous son drapeau dans une même communauté nationale mais selon ses
traditions et ses coutumes ;
 Enfin, à partir de novembre 1950 l’AICLF réclame le droit de vote pour tous les Indigènes qui
savent lire et écrire le français (vœu sur lequel l’UICALO finira par s’aligner).
À travers ce programme, on sent que la vocation prioritaire de l’Association est de susciter et
d’encourager le développement économique et social de la réserve.
Mais comme l’UICALO, l’AICLF s’orientera rapidement vers le champ politique en soutenant la
candidature de Maurice Lenormand à la députation en 1951, puis les listes d’union calédonienne pour
les élections au Conseil général. Et dans le mouvement d’Union calédonienne fondé en 1956, le
président de l’AICLF Doui Matayo est présent avec le titre de vice-président.

L’engagement politique des deux associations les retirera peu à peu du giron des Églises. Mais si
l’UICALO, malgré le départ de nombre de ses notables en rupture avec Maurice Lenormand le
fondateur de l’UC restera proche de ce parti, l’AICLF sous l’influence du pasteur Charlemagne
évoluera vers l’opposition à l’UC.

Création Luc Steinmetz juillet 2005
Sources : Ismet Kurtovitch – Aux origines du FLNKS – Éditions Île de Lumière Nouméa
Père Georges Delbos – l’Église catholique en Nouvelle-Calédonie Un siècle et demi d’histoire
Collection Mémoire chrétienne, Desclée Paris 1993

Annexe 3 : Double collège

La solution du double collège, notion souvent méconnue, comme moyen d’organiser
l’accession des Mélanésiens au droit de vote dans le cadre du suffrage universel, au lendemain
de la Seconde Guerre mondiale, est étudiée ici par Ismet Kurtovitch, spécialiste de la période.

De la fin de la Seconde Guerre mondiale à l’année 1957, le changement du régime électoral du statut
de la Nouvelle-Calédonie est au centre d’une négociation entre l’État, les Européens et les Kanak.
Cette négociation est dominée par une conception électorale nouvelle fondée sur l’intégration
progressive des autochtones calédoniens dans la vie politique locale et nationale.
Les négociations sont difficiles et délicates parce que la prépondérance démographique de la
population kanak et l’application démocratique – un homme, une voix – priverait la population
européenne de la représentation de la Nouvelle-Calédonie au Parlement et lui ferait perdre la majorité
au Conseil général et dans la plupart des municipalités. Cette éventualité n’étant souhaitée par aucun
des partenaires de la négociation, plusieurs formes d’aménagements des principes démocratiques
sont alors proposées pour organiser le partage et l’exercice du pouvoir par et entre les Kanak et les
Européens.

1. Application du suffrage universel mais dans le cadre d’un double collège électoral couplé avec une
répartition non proportionnelle des sièges attribués à chaque collège. Le collège des électeurs de
statut particulier, plus nombreux, élisant un nombre de conseillers généraux inférieur à celui des
électeurs de droit commun.
2. Application du suffrage universel mais dans le cadre d’un découpage des circonscriptions selon la
nature de la propriété du sol. Les électeurs kanak de la Grande Terre font partie d’une circonscription
électorale particulière dite des districts, les îles Loyauté formant une circonscription. Cette solution,
associée à une répartition des sièges non proportionnelle à la démographie des circonscriptions, sera
retenue dans le statut de 1952.
3. Instauration d’un régime électoral capacitaire pour la seule population kanak. Sont titulaires du droit
de vote les adultes qui remplissent certaines conditions, comme par exemple être fonctionnaire,
ancien combattant, ministre du culte, catéchiste, chef coutumier, ou savoir lire et écrire. Cette formule
est utilisée pour toutes les élections entre 1945 et 1956. Toutefois, dès 1951, environ 80 % des Kanak
sont titulaires du droit électoral.
4. Création d’une ou de deux « assemblées représentatives indigènes » élues, chargées de faire
valoir auprès de l’État et du Conseil général le point de vue et les intérêts de la population des districts
et des tribus. Cette formule sera préconisée jusqu’en 1951 par les partis politiques kanak (l’UICALO et
l’AICLF) et le Conseil général, mais refusée par le Gouvernement central et le Parlement.

Enfin, pour sortir de l’impasse, Jean Vergès, conseiller privé, trouve une solution originale.
Instauration du suffrage universel au niveau des électeurs mais maintien du double collège au niveau
des élus. Autrement dit, chaque électeur, quel que soit son statut civil, choisit un nombre déterminé de
candidats de statut civil dit de droit commun et de statut civil dit particulier, ces derniers étant les
moins nombreux. Cette trouvaille est acceptée par les représentants de la population kanak mais
délaissée par Paris qui préfère envoyer une mission parlementaire qui obtiendra, le 17 septembre
1952, un compromis provisoire : celui-ci est un mélange de suffrage capacitaire, de répartition inégale
des sièges à pourvoir et de circonscriptions territoriales assises sur la tenure foncière. Ce régime
électoral sera appliqué de 1953 à 1957, il permettra l’entrée de neuf Kanak au Conseil général.
Après l’instauration du suffrage universel égal en 1957 associé au statut dit de « la loi-cadre » et
l’arrivée au pouvoir à Nouméa d’un parti, l’Union calédonienne, la question du régime électoral du
statut passe au second plan pour réapparaître après le boom minier des années 1970-1972 et la
revendication d’indépendance kanak socialiste en 1975. Aujourd’hui, le découpage de la Nouvelle-
Calédonie en trois provinces, qui sont également des circonscriptions électorales, dont les
assemblées sont élues par un corps électoral différent de celui des autres élections directes, atteste la
poursuite en Nouvelle-Calédonie d’une application singulière du principe démocratique rendue
nécessaire par le présence de deux communautés nationales historiquement constituées et dont les
vues divergent quant à l’avenir institutionnel de leur pays.

Article « Double collège » in Les institutions de la Nouvelle-Calédonie. Collection 101 mots pour comprendre - Auteur Ismet Kurtovitch Éditions Île de Lumière Nouméa mai 2002

Annexe 4 : Les lois Billotte

La promulgation le 3 janvier 1969 de trois lois dites « Billotte » du nom du ministre d’État chargé des
Dom-Tom qui en a été le principal auteur a ouvert une nouvelle ère des relations entre la Nouvelle-
Calédonie et la Métropole en ce sens qu’elles ont marqué une recul de l’autonomie, le deuxième de la
décennie après la réforme statutaire de la loi Jacquinot de 1963.
Ces lois ont été publiées au JONC du 17 janvier 1969. Il s’agit de :
 la loi n° 69-4 modifiant la réglementation minière en Nouvelle-Calédonie ;
 la loi n° 69-5 portant création et organisation des communes en Nouvelle-Calédonie ;
 la loi n° 69-6 portant régime fiscal de certains investissements en Nouvelle-Calédonie.

1° L’élaboration des lois Billotte

Ces lois, préparées dès 1967, ont été étudiées sous forme de projets par l’assemblée territoriale dès le
mois de décembre 1967. Majorité (UC) et opposition locales s’étaient montrées d’emblée hostiles à
ces trois projets de loi en séance publique le 27 février, avant que leur étude ne soit poursuivie en
commission. Lors d’un nouveau vote le 16 janvier 1968, le projet modifiant la réglementation minière
et le régime fiscal des investissements rencontrèrent de nouveau l’opposition unanime de l’assemblée
territoriale, tandis que sur le projet portant création des communes les avis étaient plus nuancés. Le
vote final sur l’ensemble des trois projets donna le résultat suivant : 29 voix contre, 6 abstentions (de
conseillers favorables au projet sur les communes), mais aucune voix favorable, traduisant le vent de
mécontentement qui avait soufflé au sein de l’assemblée territoriale.
À la suite de ce rejet, l’Union calédonienne pour canaliser les protestations fit voter par l’assemblée
territoriale une motion d’autonomie interne qui recueillit 23 voix contre 8 et une abstention. La
discussion des trois projets de loi se déroula au Parlement en novembre et décembre 1968.
L’assemblée territoriale par un nouveau vote unanime intervenu le 8 novembre 1968 manifesta une
fois de plus son hostilité aux trois textes (avec toujours une nuance sur la loi communale). Mais Paris
n’en tint pas compte et les trois projets furent votés fin décembre par le Parlement et devinrent les lois
Billotte du 3 janvier 1969 même si entre temps le général Billotte avait été remplacé rue Oudinot par
Joël Le Theule.

2° Le contenu des lois Billotte

1. La loi n° 69-4 modifiant la réglementation minière transfère à l’État les plus hautes
responsabilités de l’activité minière calédonienne. Jusqu’à cette loi, c’était un texte local voté
par l’assemblée territoriale qui codifiait l’activité minière à tous les stades de la recherche de
l’exploitation et de la vente. La 1ère loi Billotte s’attaque à ce dispositif. Elle dispose que les
conditions de demande et de délivrance des permis de recherche seront définies par décret en
Conseil d’État et il soumet la recherche du nickel, du cobalt et du chrome à ces conditions,
classant ainsi les trois minerais calédoniens dans la catégorie des substances stratégiques au
même titre que l’uranium et le pétrole. Cette loi prévoit encore que la délivrance des APM
(autorisations personnelles minières) sera de la compétence du ministre de l’industrie.

2. La loi n° 69-5 porte création et organisation des communes en Nouvelle-Calédonie. Avant
cette loi, seule Nouméa avait le statut d’une commune de type métropolitain (c’est-à-dire régie
par le droit commun français selon le principe de l’uniformité communale). Jusqu’en 1961, les
« centres » autres que Nouméa étaient gérés par des « commissions municipales » (là où la
population d’origine européenne était importante) et par des « commissions régionales » (dans
les centres à dominante mélanésienne). En 1961, ces commissions avaient été fusionnées dans
une nouvelle structure les municipalités, par arrêté du chef du Territoire le gouverneur Laurent
Péchoux. Ces municipalités étaient des collectivités territoriales de droit local dérogeant aux
communes françaises.
La deuxième loi Billotte instaure en Nouvelle-Calédonie les communes de droit national en
remplacement des municipalités antérieures. Ainsi les communes de Nouvelle-Calédonie (il y
en avait 31 à l’époque) deviennent des collectivités territoriales de la République et ne sont
plus des communes de droit local. Elles seront désormais soumises à la tutelle de l’État sur
leurs actes et c’est pour cela qu’un des décrets d’application de cette 2ème loi Billotte instaure
des subdivisions administratives (Sud, Ouest, Est et Loyauté), cadres de déconcentration de
l’action de l’État en Nouvelle-Calédonie avec à leur tête un fonctionnaire d’État ayant rang de
sous-préfet et portant le titre de chef de subdivision : sa principale fonction sera précisément
d’exercer la tutelle sur les communes.
La deuxième loi Billotte dote les nouvelles communes de ressources budgétaires en créant le
FIP (Fonds intercommunal de péréquation) qui provient d’une quote-part de la fiscalité directe
et indirecte perçue par le Territoire.
D’une manière générale, l’esprit de cette deuxième loi Billotte donne aux communes de
Nouvelle-Calédonie des pouvoirs nouveaux jusqu’alors exercés par l’assemblée territoriale où
l’UC était majoritaire. Elle libère ainsi les communes de l’emprise de cette majorité.

3. La loi n° 69-6 porte régime fiscal de certains investissements. Elle réserve à l’État le droit
d’attribuer des avantages fiscaux à des entreprises qui s’engagent à réaliser des
investissements de plus de 575 millions de francs CFP. Avec cette loi l’État est désigné
comme l’interlocuteur valable, à la place du Territoire, pour toute opération d’investissement
industriel (on parle déjà à cette époque du désir d’Inco de s’installer en Nouvelle-Calédonie).

Avec ces trois lois, on assiste à un recul de l’autonomie par amputation des pouvoirs de l’assemblée
territoriale au profit soit du gouvernement central, soit des communes nouvelles. On comprend que
l’assemblée locale ait émis un avis défavorable sur les trois textes baptisés « lois scélérates ».

Création Luc Steinmetz juillet 2005 Sources : B. Brou – 30 ans d’Histoire de la Nouvelle-Calédonie SEH n° 31 Nouméa JONC du 17 janvier 1969

Annexe 5 : Jean-Marie Tjibaou

Acteur majeur de la vie politique calédonienne et de la revendication indépendantiste de 1975
à 1989, le leader du FLNKS Jean-Marie Tjibaou est ici présenté par Catherine Lehé.

Né en 1936 à Tiendanite, sa tribu de Hienghène, Jean-Marie Tjibaou est élevé par des missionnaires
maristes et suit une éducation religieuse jusqu’en 1947 à Canala. En 1949, il entre au petit séminaire
de Païta. En 1965, il est ordonné prêtre à Hienghène après avoir fait son noviciat à l’île Pins. Le père
Tjibaou devient deuxième vicaire à la cathédrale de Nouméa. La lecture de la thèse d’un autre prêtre
kanak du nom d’Apollinaire Ataba le bouleverse. Celle-ci remet en cause les fondements du
colonialisme enseigné par les missionnaires. Jean-Marie Tjibaou cerne mieux alors cette référence
constante à la terre qu’il entend lors des confessions. Il décide de s’orienter vers les sciences
humaines et entame une thèse en ethnologie à la Sorbonne. Mais la mort de son père vient
brutalement l’interrompre et il regagne la Calédonie. En 1970, il demande sa réduction à l’état laïque,
estimant que sa parole de prêtre le rendait impuissant face à la misère des siens. Avant d’entrer sur la
scène politique, Jean-Marie Tjibaou se limite pendant sept ans au domaine social, en s’employant à
aider les plus défavorisés. Très vite, il soutient l’idée qu’il faut utiliser les autorités coutumières pour le
développement du Territoire. En septembre 1975, il organise le grand festival de la culture kanak
« Mélanésia 2000 », qui le propulse sur le devant de la scène politique. En 1977, son engagement se
concrétise par son élection à la tête de la mairie de Hienghène. Il est le premier kanak maire de
Hienghène et sera réélu jusqu’à sa mort. Il accède à la vice-présidence de l’Union calédonienne,
principale formation du futur Front de libération kanake socialiste (FLNKS) dont il deviendra le
président en 1984. En 1979, Jean-Marie Tjibaou est élu conseiller territorial parmi les représentants
du Front indépendantiste et en juin 1982 , il devient vice-président du Conseil de gouvernement de
Nouvelle-Calédonie. À ce titre, il participe en juillet 1983 à la table ronde de Nainville-les-Roches
organisée par le Gouvernement socialiste. C’est avant tout en qualité de premier président du FLNKS
que Jean-Marie Tjibaou se fait connaître du grand public. Le mouvement prône le boycott actif des
élections territoriales du 18 novembre 1984. Des barrages sont implantés à proximité des mairies
tandis que le secrétaire général de l’Union calédonienne, Éloi Machoro, brise symboliquement une
urne à coup de hache. Le 25 novembre 1984, Jean-Marie Tjibaou fonde un « gouvernement
provisoire de Kanaky ». En décembre, deux de ses frères meurent assassinés parmi huit autres
militants dans une embuscade tendue à Hienghène. Malgré la colère, Jean-Marie Tjibaou lance un
appel de sagesse à ses militants afin de ne pas céder à la vengeance. Toutefois, la tension est à son
comble. Les événements se précipitent le 11 janvier 1985 avec la mort d’un jeune Caldoche, Yves
Tual, qui provoque une émeute dans les rues de Nouméa. Le lendemain, Éloi Machoro est tué par un
tireur d’élite du GIGN. Jean-Marie Tjibaou accuse les autorités d’assassinat politique. Le président du
FLNKS adopte la stratégie de la recherche du dialogue tout en maintenant la pression sur le terrain.
Le plan Fabius-Pisani reporte la consultation d’autodétermination après les législatives de mars 1986
suite auxquelles Jacques Chirac forme un nouveau gouvernement. Bernard Pons, ministre des Dom-
Tom désire aboutir à la dissolution du FLNKS. En août 1987, la manifestation pacifique organisée par
le parti est durement réprimée par les forces de l’ordre. Cette politique amène des militants à prendre
des gendarmes en otages à Ouvéa le 22 avril 1988. Bernard Pons règle la situation par la force. Dix-
neuf militants indépendantistes sont tués. Avec le retour au Gouvernement des socialistes et la
mission du dialogue de Michel Rocard, Jean-Marie Tjibaou choisit de construire l’avenir en serrant la
main de son plus grand adversaire loyaliste, Jacques Lafleur. Tous deux signent le 26 juin 1988 les
Accords de Matignon. Cette poignée de main n’avait pourtant pas fait l’unanimité. Et durant la
cérémonie coutumière de la levée de deuil kanak des morts d’Ouvéa, Jean-Marie Tjibaou et Yeiwéné
Yeiwéné sont assassinés par Djubély Wéa le 5 mai 1989.

Article « Tjibaou » in Les institutions de la Nouvelle-Calédonie
Collection 101 mots pour comprendre – Auteur Catherine Lehé
Éditions Île de Lumière Nouméa mai 2002

Annexe 6 : Jacques Lafleur

Jacques Lafleur a été un acteur majeur de la vie politique calédonienne depuis près de 30 ans.
Son rapide portrait est ici dressé par Frédéric Angleviel. Il convient de dire qu’il a été publié
en mai 2002 et que des faits qui se sont produits par la suite ne sont pas pris en compte dans le
document suivant (mise en ballottage de Jacques Lafleur aux législatives de juin 2002, où il
est réélu après avoir dû subir pour la première fois un second tour ; perte de la présidence de
la province Sud après la défaite du Rassemblement aux élections de mai 2004 au congrès et
aux assemblées de province ; retrait annoncé de la vie politique en 2005).

Fils cadet du « petit mineur » calédonien Henri Lafleur, Jacques Lafleur est né à Nouméa le 20
novembre 1932. Récemment, il déclarait dans le quotidien local Les Nouvelles Calédoniennes :
« Après mon service militaire et mes études (de droit), je me suis aperçu que ma famille n’était pas
riche contrairement à ce que je pensais. Alors j’ai travaillé comme une bête pour le devenir. Je n’ai
hérité de rien du tout ». Et de conclure « J’ai souvent, vous savez, entendu des gens me dire : « On
est derrière vous ». Sauf que moi j’aurais souvent aimé les avoir devant moi ». Le groupe Lafleur
intervient dans plusieurs domaines de l’économie calédonienne : mines, immobilier, brasserie,
matériel de bureau ou encore produits d’entretien. Dans le cadre du rééquilibrage, J. Lafleur vendit en
1991 à la province Nord via un financement de l’État ses parts de la Société minière du Sud Pacifique
(SMSP).
Jacques Lafleur est élu à l’Assemblée territoriale dès 1972 puis il siège au conseil de gouvernement
jusqu’en 1977. Conscient de l’amorce d’une crise politique fondée sur l’émergence d’une mouvance
indépendantiste couplée à l’émiettement des partis favorables au maintien de liens étroits avec la
métropole, il fonde, le 17 avril 1977, le Rassemblement pour la Calédonie, qui devient
Rassemblement pour la Calédonie dans la République en 1978 à la suite de la venue de Jacques
Chirac sur le Territoire. La charte fondatrice du mouvement qu’il rédige révèle et préfigure les valeurs
de solidarité, de consensus et d’émancipation qui ont présidé aux Accords de Matignon et à l’Accord
de Nouméa. Le 26 juin 1988, pour mettre fin à la guerre civile qui a endeuillé la Nouvelle-Calédonie et
qui opposait les partisans de l’indépendance aux non-indépendantistes, il signe les Accords de
Matignon avec l’État français et Jean-Marie Tjibaou, chef de file des indépendantistes.
Dès 1991, Jacques Lafleur anticipe la résurgence inéluctable d’événements dramatiques tels que
ceux de 1984 en cas de référendum d’autodétermination prévu au terme des Accords de Matignon en
1998. Il le qualifie de « référendum couperet ». Il imagine alors des concepts politiquement et
juridiquement inédits et propose une solution novatrice : la solution consensuelle puis, en 1995, un
pacte trentenaire visant à favoriser l’émancipation de la Nouvelle-Calédonie dans la République. Elles
inspireront l’Accord de Nouméa signé le 5 mai 1998 entre l’État, le FLNKS et le RPCR.
Député de la Nouvelle-Calédonie depuis 1978, réélu à chaque élection à une large majorité au
premier tour, les relations d’amitié qu’il a tissées au plus haut niveau politique et industriel
métropolitain et étranger ont été indispensables à la Nouvelle-Calédonie dans plusieurs dossiers.
Homme de caractère, il n’hésite pas en 1982 à démissionner de son mandat de député pour
manifester son désaccord avec la politique menée par les socialistes en Nouvelle-Calédonie. Il est
réélu dès le premier tour avec 91,4 % des voix.
Jacques Lafleur est aussi le président de l’assemblée de la province Sud réélu dans ses fonctions
depuis l’origine de la provincialisation en 1989. La politique du Rassemblement se résume dans cette
maxime de son président : « que ceux qui savent aillent vers ceux qui ne savent pas et que ceux qui
ont aillent vers ceux qui n’ont pas ». La poignée de main à Jean-Marie Tjibaou en est le symbole.
Homme de parole, charismatique, autoritaire, passionné, généreux, humain et humaniste, Jacques
Lafleur a aussi écrit L’Assiégé. Il y donne sa version de l’histoire contemporaine calédonienne et
métropolitaine, propose une nouvelle vision de l’État axée sur la décentralisation mais révèle aussi
ses pensées intimes qui sont autant de faces cachées d’un personnage fort complexe.

Article « Jacques Lafleur » in Les institutions de la Nouvelle-Calédonie Collection 101 mots pour comprendre – Auteur Frédéric Angleviel Éditions Île de Lumière Nouméa mai 2002

Annexe 7 : Les transformations économiques de la Nouvelle-Calédonie de 1969 à 1997

Les informations qui suivent sont tirées de l’ouvrage L’outre-mer français (Armand Colin
mai 2000), dont l’auteur est le géographe Jean-Pierre Doumenge, directeur de recherche au
CNRS, ancien recteur de l’Académie Antilles-Guyane.

Les transformations économiques : une implication croissante dans le tertiaire

1. La tertiarisation de l’économie

La répartition sectorielle de la population active et du PIB font apparaître le poids croissant du secteur public
comme moteur de l’économie.
En 1996, sur un total de 64 377 personnes occupées, 9 055 travaillent dans les services publics, 8027 dans le
commerce, 13 217 da ns l’industrie (dont 6 086 dans le BTP), 2 143 dans l’agriculture marchande, 7 412 dans
l’agriculture d’autoconsommation trouvant place sur les terres coutumiè res. Plus des trois quarts des 48 116
salariés exercent leur activité à Nouméa où sont impl antés 70 % des 7 849 employeurs. Hors du Grand Nouméa,
trois à quatre secteurs drainent l’essentiel des actifs : dans tous les cas, l’agriculture, le commerce et les
administrations et, dans le tier s des communes, la mine.
Au regard d e ces chiffres, le produit intérieur brut de 1996 se décompose en trois postes majeurs (administration
25,7 % ; commerce 22,2 % ; services marchands 20,9 %), trois postes intermédiaires (industrie du nickel 8,7 % ;
transports et télécommunications 6,3 % ; BTP 5,7 %) ; l’agriculture et la pêche ne représentent plus que 1,8 %
du PIB malgré d’indéniables efforts en terme de production de viande bovine et d’aquaculture de la crevette. Le
secteur eau-énergie et celui des industries manufacturières compte respectivement pour 1,5 % et 2,6 % alors que
l’importance des équipements industriels et la taille de l’agglomération urbaine feraient croire à un niveau élevé
de consommation.
Compte tenu de la conjoncture internationale, le secteur mine-métall urgi e enre gistre périodiquement de notables
fluctuations. Entre 1970 et 1985 les administrations ont connu pour leur part une progression forte et continue
(6 % en 1970, 16 % en 1975, 24 % en 1980, 31 % en 1985) pour se stabiliser ensuite autour de 28 %. Par les
salaires qu’il verse et les commandes qu’il passe aux entreprises, le secteur public est, à la fin des années 1990,
le moteur de l’économie alors qu’il y a trente ans c’était le secteur de l’extraction et du traitement du nickel qui
assumait ce rôle.

2. Le « système nickel »

En 1970, en plein boom, l’industrie du nickel représentait 30,3 % du PIB de la Nouvelle-Calédonie, faisant
travailler 6 900 personnes. Sur 40 000 actifs occupés que comptait alors le Territoire, on dénombrait 3 400
salariés de la mine et 3 500 ouvriers métallurgistes. À elle seule, la SLN employait alors plus de 5 000 personnes.
Depuis cette date, la contribution des activités minières et métallurgiques à la formation du PIB et en matière
d’emploi a considérablement baissé, alors même que l’extraction du minerai retrouvait seulement en 1997 le
niveau de 1972. Au cours de 1997, 8,2 millions de tonnes de minerai (soit 136 000 t de métal contenu) ont donc
été extraites de l a Grande-Terre : 5,3 millions de tonnes ont été e xportées en br ut vers le Japon, l’Australie et les
Etats-Unis, le reste étant traité à Doniambo (procurant 54 900 t de métal).

3. L’apport de l’agriculture

Élevage et pêche confondus, ce secteur connaît une baisse continue de valeur à la production (13 % du PIB en
1963, 2 % en 1983, seulement 1,7 % en 1996). La surface agricole réellement utilisée a régressé d’environ un
tiers au cours des vingt dernières années, pour se stabiliser aux alentours de 210 000 ha, dont 95 % en
pâturages. Si, en valeur ajoutée, les activités agricoles sont devenues marginales, elles peuvent être localement
un enjeu important, tant en terme d’aménage ment du territoire que d’équilibre de la société, du moins lorsqu’elles
sont pratiquées avec sérieux, que se soient les cultures vivrières autoconsommées trouvant place sur les terres
coutumières d es tribus kanak, ou le grand élevage extensif mené par des éleveurs européens et des groupement
d’élevage mélanésiens ; récemment aussi l’aquacu lture et l’élevage des cervidés développés sur la côte
occidentale de la Grande-Terre affichent des résultats prometteurs.

Annexe 8 : La table ronde de Nainville-les-Roches

L’arrivée de la gauche au pouvoir à Paris en mai 1981 a réjoui les indépendantistes qui y ont vu un
encouragement à leurs thèses. Le programme commun de gouvernement PS/PC mentionnait en effet l’Outre-Mer
dans la rubrique « politique étrangère ». Du coup une ambiguïté devait peser sur les rapports entre les
indépendantistes kanak et la gauche maintenant au pouvoir : les indépendantistes pensaient que la gauche allait
donner l’indépendance aux Kanak tandis que la gauche de gouvernement s’apercevait qu’une majorité locale y
était hostile. Localement, en Nouvelle-Calédonie, la situation s’est lentement mais notablement dégradée après
1981.
Face à cette dégradation, le Secrétaire d’État aux DOM-TOM Georges Lemoine décide de convoquer en juillet
1983 à Nainville-les-Roches (dans l’Essonne) une « table ronde » sur l’évolution du Territoire, avec les
parlementaires de la Nouvelle-Calédonie, le vice-président du gouvernement et le président de l’assemblée
territoriale, des représentants du FI, du RPCR, de la FNSC et des grands-chefs coutumiers.
À l’issue de cette réunion, une déclaration en trois points a été rédigée. Elle n’a été signée que par le FI et la
FNSC, le RPCR refusant le contenu du 2e point. Nainville-les-Roches se termine don c par un échec. Ce qui n’a
pas empêché Georges Lemoine de préparer, sur la base de cette table ronde et de sa déclaration finale un
nouveau statu t, rejeté à l’unanimité par l’assemblée territoriale consultée pour avis le 16 avril 1984, mais adopté
en mai 1984 par la seule Assemblée Natio nale. Dès lors la rupture entre le gouvernement socialiste et les
indépendantistes était inéluctable.
L’entrée en application de ce statut avec les élections de 1984 et le « boycott actif » de ces électio ns par le FI ont
marqué le début de la période dite des « événements ».

NAINVILLE-LES-ROCHES

Mardi 12 juillet 1983
Déclaration de la table ronde

I

Volonté commune des participants de voir confirmer définitivement l’abolition du fait colonial par la reconnaissance à l’égalité de
la civilisation mélanésienne et la manifestation de sa représentativité par la coutume dans les institutions à définir.

II

Reconnaissance de la légitimité du peuple kanak, premier occupant du Territoire, se voyant reconnaître, en tant que tel, un droit
inné et actif à l’indépendance, dont l’exercice doit se faire dans le cadre de l’autodétermination prévue et définie par la
Constitution de la République Française, autodétermination ouverte également, pour des raisons historiques, aux autres ethnies
dont la légitimité est reconnue par les représentants du peuple kanak.

III

Favoriser l’exercice de l’autodétermination est « une des vocations de la France » qui doit permettre d’aboutir à un choix, y
compris celui de l’indépendance. Il faut préparer cette démarche vers l’autodétermination qui sera le fait du peuple calédonien
défini par la logique ci-dessus admise, lorsqu’il en ressentira la nécessité. Pour préparer cette démarche, chacun est conscient
qu’il faut élaborer un statut d’autonomie interne qui sera spécifique, qui sera évolutif et qui marquera donc une phase de
transition en prenant en compte les données politiques et économiques car il n’y aura de développement économique qu’avec
la stabilité politique.

Le Mémorial calédonien tome 9 p 178

Il est intéressant de relever le point de vue d’Alain Christnacht sur les réserves exprimées par le RPCR sur le 2e
point de la déclaration de Nainville-les-Roches, réserves qui ont poussé le parti de Jacques Lafleur à refuser de
signer le document final.

« Les représentants du peuple kanak ont-ils accepté à Nainville-les-Roches d e reconnaître la lég itimité de la
présence sur le Territoire de tous les Néo-Calédoniens des autres ethnies ou se sont-ils vu reconnaître le droit de
choisir par la suite ceux des Néo-Calédoniens non kanak dont ils jugeraient q u’ils ont acquis une légitimité à
participer à ce que les indépen dan tistes espèrent voir devenir une nouvelle communauté nationale ? »

Création Luc Steinmetz juillet 2005

Annexe 9 : La croissance démographique de la Nouvelle-Calédonie et la poussée urbaine autour de Nouméa entre 1969 et 1996

Les informations qui suivent sont tirées du l’ouvrage L’outre-mer français (Armand Colin
mai 2000), dont l’auteur est le géographe Jean-Pierre Doumenge, directeur de recherche au
CNRS, ancien recteur de l’Académie Antilles-Guyane.

1. Un doublement de la population entre 1969 et 1996

Au cours de la période qui sépare les deux recensements de 1969 et de 1996, la population de la Nouvelle-
Calédonie a doublé : entre 1969 et 1976, le passage de 100 579 à 133 233 hab itants est lié à la fois à un croît
naturel élevé et à une forte immigration en provenance de la France métropolitaine et de l’outre-mer français. ;
depuis 1976, l’accroissement de la population du Territoire est lié surtout au dynamisme des groupes en place.
La vitesse de progression de la population s’exprime avec le plus de force en province Sud qui, en vingt ans
passe de 86 694 habitants (1976) à 134 546 habitants (1996). Dans le même temps, la p opu lation de la province
Nord passait de 32 021 à 41 413, celle d es îles Loyauté de 14 518 à 20 877. Des glissements interrégionaux
renforce donc le pôle nouméen de façon continue depuis trente ans et très accessoirement son relais de Bourail,
rarement les autres communes du Sud. De plus en plus le Grand Nouméa fait donc figure d’agglomération
cosmopolite, de « ville métisse ». Elle attire naturellement la main-d’œuvre de tout le Territoire, car elle cumule
les activités les plus diversifiées, en particulier celles à haute valeur ajoutée.

2. La poussée urbaine autour de Nouméa

Chef-lieu de la Nouvelle-Calédonie, Nouméa est passé de 34 900 habitants en 1963 à 76 293 habitants en 1996
(118 823 ha b. si on prend le pôle urbain appelé le Grand Nouméa et qui comprend Nouméa, le Mont-Dore,
Dumbéa et Païta).

La gran de poussée urbaine est contemporaine du boom économique de 1969-1972. Dans une conjoncture
exceptionnellement favorable (forte demande mondiale de nickel, grèves dans les min es et les usines nickélifères
du Canada), la production du métal et l’exportation du miner ai atteignirent des niveaux record. Cette euphorie
attira 20 000 migrants, ce qui fit s’accroître brusquement le niveau de la consommati on et plus particulièrement
exploser le marché de l’immobilier.

Dans la hâte, les pouvoirs publics décidèrent la construction de gra nds ensembles collectifs, alors que les acteurs
fonciers locaux mettaient sur le marché une partie de leurs réserves. C’est ainsi qu’entre 1960 et 1975, l’espace
bâti gagne 1 000 ha sur la commune de Nouméa et 1 600 ha sur les communes limitrophes de Dumbéa et du
Mont-Dore.

Cette évolution de l’espace ur bain comporte trois volets :
- les nouveaux pér imètres industriels (le nouveau port, les extensions de l’usine métallurgique de Doniambo, la
zone industrielle de Ducos) sont gagn és par remblaiement sur la mer ou sur la mangrove ;
- les grandes cités apparaissent : Tindu, Pierre-Lenquette, de Sa int-Quentin, tand is que Rivière-Salée devient
un nouveau quartier de Nouméa, comme Koutio devie nt un nouveau quartier de Dumbéa ;
- les lotissements privés résidentiels colonisent les collines de Nouméa.

L’indépendance mal négociée du Vanuatu amena plusieurs milliers de francophones (Européens, Polynésiens et
Vietnamiens) à se réfugier à Nouméa au début des années 1980.
À la suite des événements violents intervenus en Nouvelle-Calédonie à partir de 1984, la quasi-totalité des
Européens résidant sur la côte est ainsi qu’une partie de la population mélanésienne de la Grande-Terre et des
îles Loyauté ont à leur tour précipitamment reflué vers Nouméa. D’une façon génér ale, de plus en plus de
Mélanésiens viennent chercher en ville le travail (dans le tertiaire) qu’ils ne trouvent pas « en brousse » ou dans
les îles (l’agriculture n’attire plus, la mine débauche).

Cette attirance extrême pour la vie dans le Grand Nouméa fait qu’en 1996, les Européens ne bénéficient plus que
d’une majorité relative dans l’agglomération. Avec 46 % de la population, ils devancent tout de même largement
les Mélanésiens (21 %), les Polynésiens de Wallis-et-Futuna et de Tahiti (18 %), les Asiatiques d’origine
indonésienne ou vietnamienne (8 %) et les petites minorités venues du Vanuatu ou des Antilles. Le
Grand Nouméa est donc une agglomération métisse où chaque composante essaie de s’intégrer. Si bien qu’au
cours des années 1990, un millier de ménages ruraux, principalement mélanésiens, sont venus « squatter » des
terrains municipaux mis en réserve, des mangroves et que lques domaines privés en attente de lotissement.

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Annexe 10 : Documentation iconographique

10 – 1 :

La construction du barrage de Yaté en 1954
Source : manuel de BEP histoire-géographie, CDP NC, Nouméa, 1997

10 – 2 :

Premier gouvernement calédonien UC issu de la loi-cadre mis en place après la première élection de l’assemblée territoriale en octobre 1957
Source : le Mémorial calédonien, tome VI, page 15

Cette photo permet de voir autour du gouverneur Aimé Grimald, président du conseil de
gouvernement, le député Maurice Lenormand (vice-président de ce conseil), de Roch Pidjot, à
l’extrême droite, de Doui Matayo Wetta, à l’extrême gauche, leaders respectivement de
l’UICALO et de l’AICLF, ce qui met en évidence le rôle de ces deux associations dans la
création de l’Union calédonienne.

10 – 3 :

Kowi Bouillant
Source : Ismet Kurtovitch, Aux
origines du FLNKS : l’UICALO
et l’AICLF (1946-1953) – Ile de
Lumière - Nouméa 1997

10 – 4 :

Michel Kauma
Source : Ismet
Kurtovitch, Aux origines
du FLNKS : l’UICALO et
l’AICLF (1946-1953) – Ile
de Lumière - Nouméa
1997

10 – 5 :

Maurice Lenormand
Source : Une histoire en 100 histoires, bambou édition, Nouméa, 2004

10 – 6 :

Rock Pidjot
Source : Ismet Kurtovitch, Aux
origines du FLNKS : l’UICALO
et l’AICLF (1946-1953) – Ile de
Lumière - Nouméa 1997

10 – 7 :

Doui Matayo Wetta
Source : le Mémorial
calédonien, tome VI,
page 15

10 – 8 :

La modernisation de l’aéroport de Tontouta en 1958
Source : manuel de BEP histoire-géographie, CDP NC, Nouméa, 1997

10 – 9 : les lois Billotte (1969)

10 – 11 :

Nainville-les-Roches, 1983
Source : le Mémorial calédonien, tome IX, page 177

10 – 12 :

Barrage indépendantiste en 1984
Source : le Mémorial calédonien, tome IX, page 190

10 – 13 :

Manifestation loyaliste en Brousse regroupant métis et kanak
Source : le Mémorial calédonien, tome IX, page 233

10 – 14 :

Manifestation loyaliste à Nouméa
Source : le Mémorial calédonien, tome IX, page 262

10 – 15 :

Accords de Matignon, la poignée de mains Lafleur/Tjibaou
Source : le Mémorial calédonien, tome IX, page 386

10 – 16 :

Accord de Nouméa, 5 mai 1998
Source : le Mémorial calédonien, tome X, page 139

BIBLIOGRAPHIE

  • Arréghini Louis & Waniez Philippe - La Nouvelle-Calédonie au tournant des années 1990, un état des lieux - Reclus/La documentation française – Paris 1993
  • François Audigier - Les gaullistes et la Nouvelle-Calédonie de l’après-guerre à 1981 –in n° 4 Revue juridique, politique et économique de Nouvelle-Calédonie – CDP - Nouméa octobre 2004
  • Jean-Claude Briault - 2018 : la fin de l’Accord de Nouméa – Begach Nouméa – 2005
  • Bernard Brou - 30 ans d’histoire de la Nouvelle-Calédonie - SEHNC n° 31 – Nouméa 1982
  • Bernard Brou - Nos lendemains chanteront-ils ? La Nouvelle-Calédonie de 1957 à 1999 – Association Histoire NC – Nouméa 2003
  • Jérôme Cazamayou et Thomas de Deckker Gabriel Païta, témoignage kanak – L’Harmattan – collection Mondes océaniens – Paris septembre 1999
  • Alain Christnacht – La Nouvelle-Calédonie – Les études de la Documentation française - Paris Février 2004
  • Alain Christnacht - L’œil de Matignon – Collection l’épreuve des faits – Le Seuil Paris 2003
  • Georges Delbos – L’Église catholique en Nouvelle-Calédonie, un siècle et demi d’histoire – Collection Mémoire chrétienne – Desclée Paris 1993
  • Marianne Devaux - L’organisation administrative de la Nouvelle-Calédonie (Institutions et régime législatif) – CDP - Nouméa 1997
  • Jean-Pierre Doumenge – L’outre-mer français - Collection U – Armand Colin Paris 2000
  • Jean-Yves Faberon - La Nouvelle-Calédonie, laboratoire de statuts de territoire d’outre-mer – SEH - Nouméa 1992
  • Ismet Kurtovitch - Aux origines du FLNKS : l’UICALO et l’AICLF (1946-1953) – Ile de Lumière - Nouméa 1997
  • Jacques Lafleur - L’assiégé : 25 ans de vie politique, une histoire partagée avec la Nouvelle-Calédonie – Plon Paris - 2000
  • Ouvrage collectif sous la direction de Jean-Marc Régnault - François Mitterrand et les territoires français du Pacifique – Les Indes savantes – Paris novembre 2003
  • Ouvrage collectif - La Nouvelle-Calédonie (Histoire CM) – CTRDP Hachette – Nouméa 1992
  • Ouvrage collectif - Le Mémorial calédonien – Tomes 8, 9 et 10 – Planète Mémo Nouméa.
  • Ouvrage collectif sous la direction de Frédéric Angleviel - 101 mots pour comprendre l’histoire de la Nouvelle-Calédonie – Ile de Lumière – Nouméa 1997
  • Ouvrage collectif sous la direction de Jean-Yves Faberon et François Garde – 101 mots pour comprendre les institutions de la Nouvelle-Calédonie – Ile de Lumière – Nouméa 2002
  • Ouvrage collectif - Éducation civique en Nouvelle-Calédonie (particulièrement « Institutions et acteurs de la vie politique » par Luc Steinmetz) – CDP - Nouméa août 2001
  • Ouvrage collectif – Hommes et espaces d’Océanie, Histoire-Géographie – BEP – CDP de Nouvelle-Calédonie 1997
  • Ouvrage collectif – Cahier d’activités dirigées d’histoire-géographie et d’éducation civique – classes de BEP – CDP de Nouvelle-Calédonie 2000
  • Ouvrage collectif - Cahiers d’exercices d’Histoire-Géographie – classes de 3ème - CTRDP et éditions Grains de sable - Nouméa mars 1996
Par Luc STEINMETZ
avec le concours d’Isabelle AMIOT pour la recherche iconographique
(Juillet 2005)

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