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La Première Guerre mondiale et ses conséquences

dimanche 1er août 2010 par Claudine POUSTIS

Thème : « La Nouvelle-Calédonie pendant la Première Guerre mondiale. »

Commentaire du thème dans le programme adapté : « L’étude de la Nouvelle-Calédonie
pendant la Première Guerre mondiale permettra de découvrir à partir d’exemples la
participation active de la colonie au conflit et les événements locaux. On ne manquera pas
d’évoquer la révolte de 1917. »

Notions-clés : colonie, citoyen, sujet, patriotisme, contingent, réservistes, mobilisés,
« Niaoulis », indigènes, engagés volontaires, tirailleurs, Bataillon (mixte) du Pacifique, EFO,
ANZAC, révolte canaque, tomber au Champ d’Honneur, devoir de mémoire.

 ORIENTATIONS

Ce document d’accompagnement a pour
objectif de donner aux professeurs
quelques pistes et éléments qui leur
permettront de traiter ce sujet sans altérer
toutefois la liberté pédagogique qui leur
appartient pour aborder ce thème.

La question « La Nouvelle-Calédonie
pendant la Première Guerre mondiale »
s’insère dans la première séquence « La
Première Guerre mondiale et ses
conséquences » du bloc 1 « Guerres,
démocratie, totalitarisme, fait colonial »,
au début du premier trimestre. On peut
placer son étude avant ou après la séance
portant sur « La guerre au front, la guerre
à l’arrière »

En restant dans la ligne des précisions
apportées par les accompagnements des
programmes nationaux pour la question
concernant la Première Guerre mondiale
« On doit renoncer au récit chronologique
et privilégier la mise en évidence de ses
caractéristiques : son aspect total et la
brutalisation des rapports humains qu’elle
a impliquée », on peut concevoir une
double problématique autour de la
Nouvelle-Calédonie dans la Première
Guerre mondiale :

  • Comment la colonie participe-t-elle à la
    Grande Guerre ?
  • Quels sont les effets de la guerre pour
    la colonie ?

On ne perdra pas de vue que cette question
se situe dans une problématique générale :
l’évolution de la Nouvelle-Calédonie de
1914 à nos jours.

Selon l’horaire dévolu à ce thème (1 à 2
heures sur un horaire global de 4 à 6 heures
pour la séquence), on peut envisager une
séance qui privilégie une des deux
problématiques ou deux séances qui
permettent d’aborder ces deux aspects de
la question.

Certains documents peuvent être utilisés
comme supports dans la séance portant sur
« Une guerre totale » ou « La guerre au
front, la guerre à l’arrière ».

La mise au point scientifique
accompagnant la sélection de documents
ne prétend pas traiter de manière
exhaustive ce sujet, elle se limite à
présenter quelques aspects de la question
sur lesquels on peut plus particulièrement
insister selon les classes et la
problématique retenue. De même, le choix
des documents n’est pas limitatif.

Les mots en gras renvoient aux notions
clés qui se rapportent à la question ou à
l’ensemble de la séance.

 MISE AU POINT SCIENTIFIQUE

Les documents mentionnés dans cet approfondissement scientifique sont présentés dans le support
documentaire qui suit

 1 La place du Pacifique dans la Première Guerre mondiale.

• Contrairement à la Seconde Guerre mondiale, le Pacifique n’est pas une zone
importante de combats.

En s’appuyant sur une carte murale centrée sur le Pacifique, on rappelle que, même si le
Pacifique constitue une zone où les colonies des pays belligérants (France, Royaume Uni,
Japon, Allemagne) sont voisines, la guerre, « maritime » essentiellement, ne touche
directement les espaces de l’Océanie que de manière très secondaire et ponctuelle et se
résume à quelques actions :

  • La prise des possessions allemandes (Samoa, Nouvelle-Guinée, Micronésie) d’août à
    octobre 1914 par les pays du Pacifique alliés au Royaume-Uni, à la France et à la Russie
    (Nouvelle-Zélande, Australie et Japon) ; le Moncalm, navire-amiral de guerre français,
    participe à la conquête des colonies allemandes de Nouvelle-Guinée et du Samoa aux
    côtés des forces navales australasiennes (australiennes et néo-zélandaises).
  • Le bombardement de Papeete le 22 septembre 1914 par les croiseurs allemands
    Scharnhorst et Gneisenau de l’amiral von Spee qui occasionnent des dégâts matériels
    dans le quartier du marché et provoquent la mort de deux personnes. Le lieutenant de
    vaisseau Destremau saborde son navire La Zélée pour obéir aux « instructions en cas de
    guerre » interdisant ainsi l’accès de la passe aux navires ennemis.
  • La neutralisation de la menace que font peser les navires corsaires allemands sur les
    navires et territoires alliés.

• Cependant, un nombre non négligeable d’hommes vivant en Océanie participe à la
Grande Guerre

Après la déclaration de guerre du Royaume Uni à l’Allemagne, des bureaux sont ouverts pour
enregistrer les engagements volontaires en Australie comme en Nouvelle-Zélande. En octobre
1914 a lieu le premier départ des soldats australiens et néo-zélandais vers l’Europe. Formant
l’Australian and New Zealand Army Corps (ANZAC), les troupes levées dans les dominions
sont complétées par des volontaires des Indes, de Singapour et de Fidji affectés le plus
souvent à des tâches de manutention ; quelques Calédoniens ayant la double- nationalité par
l’origine d’un de leurs ascendants font partie des engagés volontaires de l’ANZAC.
Au total 331 814 Australiens et 112 223 Néo-Zélandais s’engagent dans l’ANZAC ; ils
représentent 13,43 % et 19,35 % de la population masculine blanche de leur pays respectifs.
Pendant la guerre, les troupes de l’ANZAC subissent de lourdes pertes à Ypres en Belgique,
à Gallipoli durant la campagne des Dardanelles, s’illustrent sur le front de France pendant la
Bataille de la Somme, elles participent aux batailles victorieuses de l’été et de l’automne
1918. L’ANZAC’s Day commémoré chaque année le 25 avril, rappelle le débarquement sur
les plages de la presqu’île de Gallipoli de ces hommes venus du bout du monde.
A la participation des soldats de l’ANZAC, il faut ajouter celle d’environ 4 000 soldats des
colonies françaises du Pacifique.

NB : dans certains ouvrages, on peut trouver l’expression « les ANZACS » au lieu de « l ‘ANZAC »

 2 La participation des Océaniens et des Calédoniens à la Grande Guerre.

• Les soldats français d’Océanie

Document 1 Le recrutement dans les colonies françaises d’Océanie

A la veille de la Première Guerre mondiale, la France est présente dans le Pacifique :

  • La Nouvelle-Calédonie et les EFO (Etablissements français de l’Océanie) sont des
    colonies françaises.
  • Les Nouvelles-Hébrides ont le statut de condominium franco-britannique
    Plus de 4 000 hommes (mobilisés ou volontaires) vivant dans ces territoires vont répondre à
    l’appel de la patrie et rejoindre la métropole pour combattre sur les différents fronts.
    La participation des ressortissants des EFO à la guerre : dès l’annonce de la guerre, le 29 août
    1914, la mobilisation commence ; 165 citoyens tahitiens gagnent Nouméa afin d’être
    embarqués pour la France. En 1916, tous les citoyens des EFO. en âge de combattre sont
    recensés. Les habitants des îles Sous-le-Vent et des Marquises, sujets français, peuvent se
    porter volontaires.
    Au total, 1057 hommes des EFO rejoignent le Bataillon mixte du Pacifique à Nouméa. Une
    centaine de « Poilus » tahitiens combattent à Salonique au sein de l’Armée d’Orient, le gros
    du contingent est engagé sur le front de France, en Champagne, puis participe à la deuxième
    Bataille de la Marne en 1918. Environ 300 des soldats polynésiens du Bataillon mixte du
    Pacifique font le sacrifice de leur vie.
  • Wallis et Futuna ont le statut de protectorat français

• La mobilisation et l’engagement des soldats calédoniens.

Document 2a Ordre de convocation des soldats calédoniens.
Document 2b Les conditions de l’engagement volontaire.

Pour la Nouvelle-Calédonie, le nombre des hommes ayant participé à la guerre de 1914-1918
est estimé à 2244 dont 1027 citoyens calédoniens blancs et 1105 Indigènes selon les derniers
travaux de Sylvette Boubin-Boyer.
Selon les sources, on peut trouver des chiffres légèrement différents, ce qui peut poser
problème. On prendra en considération ceux qui figurent dans les tableaux en annexes de la
thèse de Sylvette Boubin-Boyer et qui ont été approuvés par l’Université.
Pour mieux comprendre les deux formes principales de recrutement des soldats calédoniens, il
faut replacer la Nouvelle-Calédonie dans le contexte colonial du début du XXe siècle, avec un
statut, des droits et devoirs différents pour ses habitants et donc des rapports humains qui ne
sont pas ceux d’aujourd’hui. Il en était de même dans toutes les parties de l’empire colonial
français.

  • Les soldats d’origine française (Français nés en métropole et « créoles » nés en Nouvelle-
    Calédonie de parents français ou eux-mêmes créoles) sont mobilisés par l’arrêté du 5 août
    1914 : citoyens français, ils sont astreints au devoir de défendre la patrie. Réservistes, car
    les mobilisés d’ août 1914 ont été renvoyés dans leurs foyers puisqu’il n’y avait pas de
    navire pour les acheminer vers la métropole, ils sont appelés par l’arrêté du 9 février 1915.
    Convoqués à la caserne de Nouméa par l’ordre du Gouverneur Repiquet du 13 mars 1915,
    les 713 soldats du premier contingent calédonien quittent la Nouvelle-Calédonie le 23
    avril 1915 à bord du Sontay pour rallier la métropole.
  • Des tirailleur s, « engagés volontaires », sont recrutés parmi les Indigènes « sujets » non
    soumis à la loi sur le service militaire de 1905 (modifiée par décrets en 1911 et 1913),
    mais invités cependant par le décret du 12 décembre 1915 à rejoindre les fronts en Europe
    avec quelques Marquisiens des EFO, tout comme les Indigènes des colonies d’Afrique
    noire (les tirailleurs « sénégalais »), d’Afrique du Nord et d’Indochine pour soutenir
    l’effort de guerre de la mère patrie.

L’afflux des engagés volontaires permet de constituer le Bataillon des tirailleurs du
Pacifique à Nouméa le 4 juin 1916, le jour de son embarquement à bord du Gange. Le
bataillon est encadré par des sous-officiers calédoniens parlant les langues indigènes et le
bichelamar. Un deuxième départ s’effectue le 3 décembre 1916, puis un autre le 10 novembre
1917 par l’El Kantara. En métropole, initialement créé comme bataillon d’étape, le Bataillon
des tirailleurs du Pacifique est d’abord utilisé en métropole au chargement et déchargement
des navires pour le front d’Orient à Marseille, il devient Bataillon Mixte du Pacifique
(BMP) par l’adjonction d’une compagnie d’artillerie et se transforme en bataillon de marche
du Pacifique en avril 1917. Il est intégré comme unité combattante à partir de juin 1917 et
participe à la 2e Bataille de la Marne d’août à octobre 1918.
Le BMP s’illustre lors de la prise du village de Vesles et Caumont et de la ferme du petit
Caumont le 25 octobre 1918. Cet exploit lui vaut une citation à l’ordre de la Xe Armée remise
par le Général Mangin, le 10 décembre 1918. La citation est ornée de la roussette qui figure
sur le fanion bleu du BMP.
Au total, 1 137 indigènes calédoniens et polynésiens engagés volontaires firent partie du
BMP, parmi lesquels on compte 9 Néo-Hébridais, 4 Tahitiens embarqués à Nouméa et 18
Indochinois.
La paix revenue, le BMP est dissous le 10 mai 1919 à la veille de l’embarquement des
premiers soldats rentrant en Nouvelle-calédonie, les autres étant alors presque tous rattachés
au 73e bataillon des tirailleurs sénégalais en attendant de rentrer au pays. La plupart des
Indigènes rentrent par le Kia Ora en novembre 1919. 379 tirailleurs du BMP sont tombés au
champ d’honneur.

• Le vécu des soldats calédoniens pendant la guerre.

Document 3 Extraits de quelques lettres de « poilus » calédoniens

Le vécu des soldats calédoniens qui ont participé à la Grande Guerre sur le front de l’Est
(nord-est de la France), en Belgique ou sur le front d’Orient (Balkans) est le même que celui
des « Poilus » métropolitains. Ils ont connu la vie des camps d’entraînement ( comme celui de
La Valbonne), le quotidien des tranchées, les affres des veillées avant l’attaque, l’horreur des
champs de bataille (La Somme, Verdun, 2e Bataille de la Marne), ont vibré d’élans
patriotiques et souffert dans leur chair comme dans leur âme. D’autres ont eu un sort plus
clément en étant par exemple traducteurs de l’armée britannique, puisque beaucoup de
Calédoniens parlaient alors l’anglais. Cependant, aucun n’a été déserteur, aucun n’a participé
aux mutineries de 1917.
Beaucoup de soldats furent mobilisés sur place, le bon fonctionnement de la SLN et des
sociétés d’exploitation minière étant considéré comme nécessaire à la défense du territoire ;
idem pour les postiers, télégraphistes, marins, etc.
Pour les soldats du Bataillon Mixte du Pacifique, les conditions de séjour en métropole sont
difficiles, mais s’améliorent à partir de janvier 1917. On peut observer chez les soldats du
BMP une grande fragilité au froid (affections respiratoires aiguës) et aux épidémies
(rougeole, d’oreillons, de diphtérie).

Document 4a Dernière lettre adressée à sa mère par Louis Gondelon.
Document 4b Témoignage de Monsieur Qaeze fils de Naulue Qaeze engagé volontaire de
Lifou, soldat du B.M.P.

Les témoignages des poilus calédoniens sont parvenus au travers de multiples lettres
adressées par les « Niaoulis » à leurs familles mais aussi par la parole transmise par les
anciens combattants mélanésiens aux jeunes de leur tribu. Ces souvenirs donnent un éclairage
sur la vision que ces hommes, issus de deux mondes différents, ont pu avoir de la guerre, sur
les sentiments que celle-ci a fait naître en chacun.

Enfin, pour retracer le parcours des soldats calédoniens sur le front de France ou le Front
d’Orient, on se rapportera aux sources documentaires ou aux ouvrages mentionnés dans la
bibliographie.

 3 Les effets de la guerre à « l’arrière »

Pour la Nouvelle-Calédonie pourtant éloignée du théâtre de la guerre et à l’abri de tout danger
depuis la neutralisation de la flotte allemande du Pacifique au début de la guerre, les effets du
conflit sont sensibles.

• Le bilan humain et social

Sur 1040 mobilisés (en tenant compte des 120 Calédoniens mobilisés en métropole, des 51
engagés volontaires et 17 engagés dans l’ANZAC) et sur les 1105 Indigènes partis à la guerre,
585 (193 Européens et 381 ou 382 Indigènes) tombent au Champ d’Honneur. Ces morts à
la guerre représentent respectivement 18,5 % des effectifs des soldats calédoniens d’origine
européenne et 33,5 % des 1137 hommes recrutés tirailleurs du BMP. Pour les 1105
Canaques engagés volontaires, les pertes représentent 34,5 % des effectifs.
Les retours des Poilus calédoniens s’échelonnent de 1919 jusqu’en 1923. Ceux qui
reviennent blessés ne peuvent reprendre une vie normale. La victoire a un goût d’amertume
pour certains, en particulier les soldats canaques : les « promesses » orales des recruteurs à
propos des terres ne sont pas tenues, d’ailleurs aucune loi, aucun décret ou arrêté ne les
avaient confirmées. La guerre n’a pas gommé les inégalités de statut (Les Indigènes sont
toujours soumis au régime de l’Indigénat) malgré les moments de fraternité qu’elle a pu
engendrer. Le décret de 1933 attribuant la citoyenneté aux anciens combattants indigènes de
l’empire colonial français n’est pas ou peu appliqué en Nouvelle-Calédonie.
Sur place, on peut parler, pendant ces années de guerre, d’une misère matérielle et morale qui
affecte une fraction de la population de la Nouvelle-Calédonie comme elle a frappé
« l’arrière » en Europe. Malgré l’entraide qui se met en place, des Calédoniens connaissent la
faim et une réelle détresse due à l’isolement, à la perte de ressources, tandis que l’état
sanitaire se dégrade : des maladies (lèpre et tuberculose) se développent, des cas de peste sont
observés, on signale des gestes désespérés.
Cependant, comme en métropole à l’arrière, l’esprit de solidarité s’est manifesté de diverses
manières : des aides financières ont été attribuées aux femmes et enfants des soldats et des
tirailleurs ; comme bien d’autres, Madame Repiquet, épouse du gouverneur, regroupe les
bonnes volontés autour des Dames de France chargées de confectionner des chemises,
chaussettes et passe-montagnes pour les Calédoniens au front. Les « marraines de guerre »
calédoniennes entretiennent d’inlassables correspondances et œuvrent pour recueillir des
fonds destinés à garnir les « Colis du Niaouli ».
Les « Bons des écoles » (p 85 Mémoires océaniennes de la Grande Guerre. Chronique
calédonienne. Musée de la ville, novembre 1999) et les souscriptions aux emprunts d’Etat
montrent la participation financière des Calédoniens à l’effort de guerre.

• Une économie ralentie.

Sur le plan économique, la vie de la colonie est diversement affectée : il y a pénurie de
certaines denrées alimentaires en raison des difficultés de communication entre la Nouvelle-
Calédonie et la métropole. Pendant la guerre, les hommes jeunes et valides font cruellement
défaut dans les stations comme dans les tribus et l’agriculture, privée de bras, périclite dans
l’intérieur comme aux îles. L’exploitation minière décroît avec la fermeture du marché
allemand auquel était destinée une grande partie du nickel avant la guerre même si on
s’oriente vers des exportations en direction du Japon et des Etats-Unis. Cependant, quelques
entreprises comme « La Société de Ouaco » et « L’union alimentaire calédonienne » voient
leurs affaires fructifier par les commandes de conserves de viande pour l’armée exportées en
droiture (sorte de franchise) via l’Australie.

• La révolte canaque de 1917

Document 5 Communiqué de décembre 1917 du gouverneur Repiquet.

Si l’année 1917 a été en Europe sur les différents fronts comme à l’arrière « l’année trouble »,
elle a aussi marqué la Nouvelle-Calédonie par la révolte canaque dans le Nord de la Grande
Terre.
La révolte canaque, circonscrite de février 1917 à janvier 1918, dans le centre-nord de la
Nouvelle-Calédonie, de Hienghène à Ponérihouen et de Voh à Muéo, réveille les vieilles
peurs de l’année 1878. Cette révolte est présentée souvent comme une violente réaction des
Canaques face aux pressions exercées par les autorités pour forcer le recrutement des engagés
volontaires. Elle est, entre autres causes, surtout un problème foncier, une des multiples
résurgences de la révolte de 1878.
Lancée dans la région de Koné par Noël, le petit chef de Tiamou, elle plonge la région dans
un cycle de violences : pillages des stations et assassinats de colons, assaut de la mine Kopéto,
représailles de l’armée menées par des permissionnaires rentrés du front en 1917, les
géomètres et des auxiliaires indigènes. Des insurgés et leurs familles entières se réfugient
dans les montagnes, pourchassés par l’armée. La révolte perdure jusqu’en janvier 1918. Après
la mort du Chef Noël dont la tête aurait été ramenée à la gendarmerie de Koné et l’aman (mot
désignant la reddition d’un indigène) du sorcier Paétou, le Gouverneur déclare la fin officielle
de la révolte.
Le procès s’ouvre en juillet 1919. Le verdict est considéré comme modéré pour l’époque : 5
condamnations à mort pour assassinat dont 2 seulement sont exécutées, une soixantaine de
condamnations à des peines de prison et/ou aux travaux forcés pour les complices directs et 8
acquittements. En 1923, tous les condamnés sont élargis.
Le bilan de la révolte est lourd en vies humaines : 12 Européens ou assimilés, 62 Kanak
(selon les historiens, ce chiffre varie de 60 à 200, il convient de se rapporter aux chiffres
mentionnés qui ont été précisés par Sylvette Boubin-Boyer dans l’ouvrage cité in supra) et en
destructions (stations de colons, récoltes, cases des insurgés). Pour la première fois dans
l’histoire de la colonisation les Kanak ont répondu individuellement de leurs actes, les tribus
n’ont pas été déclarées responsables collectivement et n’ont pas été déplacées comme lors des
révoltes précédentes. Mais, même si après la guerre tout paraît rentrer dans l’ordre, le fossé
qui sépare les communautés s’accentue encore en ce début du XXe siècle.

 4 Le devoir de mémoire.

Après la joie de la victoire, le soulagement amené par le retour de la paix, la Nouvelle-
Calédonie, à l’instar de la métropole, n’oublie pas ceux qui sont morts pour la patrie.
La loi du 25 octobre 1919 relative à la commémoration et à la glorification des morts pour la
France est applicable aux colonies françaises, aussi la commune de Nouméa entreprend dès
1921 la réalisation d’un premier monument aux morts de la Grande Guerre au cimetière du
4e kilomètre pour honorer la mémoire de 144 soldats.
En même temps, on pense à l’édification d’un monument pour commémorer à Nouméa le
souvenir de tous les soldats originaires de la Nouvelle-Calédonie et des Nouvelles-Hébrides.
Le projet appuyé par les autorités municipales, le gouverneur au nom de l’Etat et les anciens
combattants, est lancé avec appel à souscription afin de ne pas mettre en difficulté le budget
de la colonie. La population calédonienne et néo-hébridaise répond avec générosité à cet
appel. Après quelques divergences portant sur l’endroit prévu pour l’érection du monument,
le choix est fixé sur un emplacement en retrait en bordure du Boulevard Cassini (aujourd’hui
avenue de la Victoire) à l’intersection de la rue de Sébastopol et du Boulevard Cassini.
Aujourd’hui, la statue de bronze représentant le « Poilu » de la Première Guerre mondiale,
armé de son fusil, a été déplacée devant l’ancienne caserne Gally Passebosc, lieu où furent
rassemblés les mobilisés et les engagés volontaires avant de s’embarquer vers le théâtre de la
guerre.
Sur trois des faces du monument sont gravés par liste alphabétique les noms et prénoms sans
mention de grade des citoyens français tombés au Champ d’Honneur. A l’origine, la
quatrième face, rendait un hommage collectif aux indigènes morts pour la France, le nom des
tribus ayant fourni des volontaires et le nombre de leurs morts étant seulement mentionnés.
Depuis 2000, aux noms des Européens, les noms des tirailleurs volontaires morts à la guerre
ont été ajoutés. Ce nom est celui qui figure sur leur acte d’engagement, il ne correspond pas
toujours à l’état civil actuel.
Pendant l’entre-deux-guerres et parfois après la Seconde guerre mondiale, avec la
participation de leurs habitants et à la mesure de leurs moyens, les villages de l’intérieur de la
Grande-Terre et les Iles construisent également des monuments pour honorer leurs morts à la
guerre.
Que ce soit à Nouméa ou dans les communes de la Grande-Terre et des Iles, ces monuments
aux morts sont des lieux de mémoire collective qui peuvent permettre aux jeunes
d’aujourd’hui d’appréhender leur présent et leur avenir par une meilleure compréhension d’un
passé partagé par les différentes communautés qui forment la Nouvelle-Calédonie.
Initialement fixé au 2 novembre, le jour du souvenir des morts de la Grande Guerre, coïncide
depuis 1924 avec la commémoration de l’armistice, le 11 novembre.


titre documents joints

La Première Guerre mondiale et ses conséquences

1er septembre 2010
info document : PDF
270.7 kio

Document sur la Nouvelle-Calédonie accompagnant le programme de troisième.


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