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La Société Le Nickel, une entreprise mondialisée

dimanche 26 février 2012 par Jean-Michel PERAUT

L’ÉTUDE DE LA SOCIÉTÉ « LE NICKEL » EN CLASSE DE PREMIÈRE DANS LE CADRE DU NOUVEAU PROGRAMME

SITUATION DANS LE PROGRAMME : THÈME 1 CROISSANCE ÉCONOMIQUE, MONDIALISATION ET MUTATION DES SOCIÉTÉS DEPUIS LE MILIEU DU XIXe SIÈCLE.

« - Il faut associer à ces mutations structurelles le rôle des acteurs, variable selon les périodes et les pays : celui des grands groupes industriels et de services très capitalistiques ; celui des myriades de petites entreprises, celui de l’État, agent majeur d’encadrement et de soutien de l’économie. La croissance s’opère sur fond d’un débat idéologique entre les tenants du libéralisme contestant l’interventionnisme étatique, et les partisans de la socialisation des moyens de production. On peut prendre comme appui un exemple d’une grande entreprise, dont les évolutions sur le long terme sont significatives de celles du contexte et des fondements de la croissance. » (Ressources pour la classe de première du lycée général et technologique. Histoire - Questions pour comprendre le vingtième siècle. Eduscol.)

C’est dans ce cadre que l’étude de la SLN peut être utilisée en tant que grande entreprise inscrite dès le départ dans la mondialisation contemporaine naissante mais aussi en tant qu’entreprise calédonienne ce qui permet de « contextualiser » cette question du programme. Une séance d’une heure devrait suffire à illustrer et à faire comprendre cette problématique aux élèves. « L’analyse des documents doit être menée dans l’esprit des nouveaux types de sujet du baccalauréat, à savoir d’une manière globale et non plus à partir de questions portant sur certains aspects. « L’exercice d’analyse de document(s), en histoire comme en géographie, comporte un titre, un ou deux documents qui peuvent être de nature diverse et des notes explicatives si nécessaire. Il est accompagné d’une consigne visant à orienter l’analyse du ou des documents. Lorsqu’un document est proposé, il s’agit de : - dégager le sens général du document en relation avec la question historique à laquelle il se rapporte ; - de montrer l’intérêt et les limites éventuelles du document pour la compréhension de cette question. » (B.O. n°5 du 3 février 2011).

PROBLÉMATIQUE : LA SOCIÉTÉ « LE NICKEL », UNE ENTREPRISE CALÉDONIENNE MONDIALISÉE.

 INTRODUCTION : LA SLN AUJOURD’HUI

DOCUMENT 1

Campagne d’affichage 2010 de la SLN

ANALYSE : Quelle image la SLN veut-elle donner d’elle-même ?

La SLN à travers ces deux affiches veut donner l’image d’une société ancrée dans l’histoire et dans la société calédonienne dans toute sa diversité. Les rappels de durée « 130 ans de la SLN » ou « 100 ans de Doniambo », site premier de l’entreprise, nous accrochent à une histoire épique (« épopée ») qui dure. Les visages de ceux qui font la SLN nous plongent dans la société calédonienne et nous montrent des images d’hommes, européen ou kanak, d’hier et d’aujourd’hui, mais aussi d’une jeune fille qui symbolise la place de la femme dans la Nouvelle-Calédonie actuelle.

 1. LA SLN, UNE ENTREPRISE MINIÈRE CAPITALISTE

DOCUMENT 2

La Société « Le Nickel » a été fondée le 10 mai 1880. Les fondateurs étaient : 1° Adolphe Basset et Henry Marbeau, agissant respectivement comme président et comme administrateur-délégué de la « Société française anonyme pour le traitement des minerais de nickel, cobalt, cuivre et autres (systèmes Jules Garnier) » ; 2° John Higginson, agissant tant en son nom personnel qu’au nom de la « Société Higginson, Hanckar & Cie » ; 3° Jean-Baptiste Brey, architecte à Paris ; 4° Albert Rodrigues-Pimentel, associé d’agent de change à Paris. — Le capital d’origine était de 6.250.000 francs. Basset et Marbeau, au nom de la « Société française anonyme pour le traitement des minerais de nickel, cobalt, cuivre et autres (systèmes Jules Garnier) », firent apport de tout l’actif de cette Société, y compris les différents brevets accordés à Jules Garnier, un intérêt de moitié dans la Société J. Higginson & Cle et l’usine de Septèmes. Higginson, au nom de la Société Higginson, Hanckar & Cie, fit apport de tout l’actif de cette Société, comprenant notamment l’ensemble de ses mines concédées, demandes de Concessions, parts et
Intérêts de mines des régions de Houaïlou, Canala, Thio, etc., un intérêt de moitié dans la Société J. Higginson & Cie, le droit d’exploitation des mines de la « Compagnie des Mines de nickel de Bel-Air », etc. En outre Higginson, en son nom personnel, fit apport de 750 actions de la « Compagnie des Mines de nickel de Bel-Air ». Le siège social de la Société « Le Nickel » est fixé à Paris, 38, rue de la Chaussée d’Antin. Une succursale est établie à Nouméa. Le premier conseil d’administration avait comme président Charles Hébert. N Henry Marbeau était vice-président et administrateur-délégué en Europe et John Higginson, administrateur-délégué en Nouvelle-Calédonie. MM. Adolphe Basset, Gabriel Bourgain, Charles Combier, Jules Garnier, Lalande Desjardins, J.-B. Lecarpentier, Louis Labitte, Edouard Marbeau et Alexandre de Saint-Yves étaient membres du conseil.

Source : Colin Newbury, La Société « Le Nickel », de sa fondation à la fin de la deuxième Guerre mondiale, 1880-1945 In : Journal de la Société des océanistes. Tome 11, 1955. pp. 97-123.

ANALYSE : En quoi la SLN est-elle une société capitaliste type ?

La SLN est dès l’origine une Société anonyme par actions. C’est donc une société capitaliste au sens propre du terme. C’est une société qui est le regroupement de deux sociétés, elles-mêmes anonymes et de deux actionnaires particuliers. Il est à noter que les capitaux ne sont pas uniquement français mais aussi internationaux à travers la société Higginson § Cie. Néanmoins, le siège social est à Paris avec une succursale à Nouméa.

 2. UNE FILIALE DU GROUPE ERAMET

DOCUMENT 3

Contrôlé depuis la fin du XIXe siècle par le groupe Rothschild, Le Nickel devient, dans les années soixante, société-mère de l’ensemble de ses filiales minières. En 1970, démarrent à Doniambo les premiers fours Demag. En 1985, après une restructuration industrielle, actionnariale et financière, les actifs de Nouvelle-Calédonie sont regroupés dans la Société Métallurgique Le Nickel-SLN, filiale d’une nouvelle société-mère, dénommée ERAMET-SLN qui deviendra, en 1994, ERAMET dans sa forme actuelle.

Source : SLN

DOCUMENT 4 A

Eramet est un groupe minier et métallurgique français. Entreprise présente dans 20 pays sur les cinq continents, son siège social est situé dans la tour Montparnasse à Paris. La fortune de la famille Duval, principal actionnaire, est estimée à 1803 M€ en 2009 (23e de France).
Le groupe est organisé autour de trois branches d’activité : Eramet Nickel : extraction et transformation de nickel en Nouvelle-Calédonie, en Indonésie et en France ; Eramet Manganèse : extraction de manganèse au Gabon et transformation en Norvège, France, États-Unis, Belgique et Chine ; Eramet Alliages : fabrication d’alliages de spécialités en France et en Suède, en particulier pour l’aéronautique

Histoire : Son origine remonte à la découverte et à l’exploitation des mines de nickel en Nouvelle-Calédonie dans les années 1880 sous le nom de société « Le Nickel », tandis que la Branche Alliages trouve son origine dans la société Aubert & Duval dont la création date de 1907.
L’extraction de manganèse à Moanda au Gabon date de 1962.
Le nom Eramet dérive de la prise de participation en 1983 de la société ERAP (Entreprise de Recherches et d’Activités Pétrolières) dans la société préexistante « Société Métallurgique Le Nickel-SLN ». On peut donc traduire l’acronyme par "Entreprise de Recherches et d’Activités METallurgiques (source : wikipédia)

Données chiffrées : Le groupe emploie plus de 14 000 personnes dans plus de 20 pays sur les cinq continents, dont plus d’une centaine d’ingénieurs en géosciences (50 % de géologues et 50 % d’ingénieurs des mines et de minéralurgie. D’ici 2018, l’entreprise envisage 10 à 20 recrutements par an au niveau « Cadre » (50 % ENSG et 50 % universitaires et école des mines) pour ces deux secteurs.
Eramet détient des positions mondiales de premier plan dans chacune de ses activités. Les trois branches du groupe, Eramet Nickel, Eramet Manganèse et Eramet Alliages ont réalisé ensemble : en 2006 un chiffre d’affaires de 3 056 M€ ; en 2007 un chiffre d’affaires de 3 792 M€, et un résultat net de 582 M€ ; en 2008 un chiffre d’affaires de 4 346 M€, et un résultat net de 694 M€ ;
La société Eramet est cotée sur Euronext Paris, où ses titres se négocient au SRD. Il figure au compartiment A et dans l’indice CAC Mid 100. En 2007, le titre a réalisé la plus forte hausse du marché SRD, alors porté par la flambée du prix du nickel et du manganèse.
Fin 2008, le groupe disposait d’une trésorerie de 1,133 milliard d’euros.

Source : Wikipédia

DOCUMENT 4 b

Structure du groupe ERAMET en 2011
Source : ERAMET

ANALYSE : quel changement pour la SLN en devenant une filiale du groupe ERAMET ?

En devenant une filiale du groupe ERAMET, la SLN lie son destin à une transnationale (dont le nickel
n’est qu’une des branches) présente dans une vingtaine de pays et qui emploie plus de 14000
personnes dans le monde. La SLN n’a plus son destin entre ses mains, mais bénéficie du soutien d’un
groupe de poids à l’international. En ce sens elle s’inscrit parfaitement dans la mondialisation actuelle
et, en partie, la Nouvelle-Calédonie avec elle.

 3 UNE ENTREPRISE IMPLIQUÉE DANS LA VIE ÉCONOMIQUE ET SOCIALE DE LA NOUVELLE-CALÉDONIE

DOCUMENT 5

En 2000, Le Nickel–SLN cède, après un dialogue financier entre ERAP et ERAMET, 30 % de son capital à la Société Territoriale Calédonienne de Participation Industrielle (STCPI), une structure publique qui fait entrer les Provinces calédoniennes dans son conseil d’administration.

Source : SLN

DOCUMENT 6

Campagne promotionnelle en 2011
Source : SLN

ANALYSE : dans quelle mesure la SLN est-elle impliquée dans la vie économique et sociale de la Nouvelle-Calédonie ?

En faisant entrer les Provinces dans son conseil d’administration, la SLN a opéré un tournant en se mettant sous le contrôle, certes partiel, des décideurs politiques du Territoire. Tout ceci s’est fait dans l’esprit de l’accord de Nouméa qui prévoit un contrôle du développement économique par la Nouvelle-Calédonie. De là découle aussi une volonté de la SLN de montrer son rôle dans le développement social et culturel de la Nouvelle-Calédonie comme le montre la 19e édition des « Nickels de l’initiative SLN », dont la première édition a d’ailleurs eu lieu bien avant l’accord de Nouméa.

 CONCLUSION : QUEL DEVENIR POUR LA SLN ?

DOCUMENT 7

Eramet juge « inconcevable » de perdre la majorité dans la SLN

NOUMÉA - Le PDG d’Eramet SA (ERA.FR), Patrick Buffet, a jugé jeudi « inconcevable » de perdre la majorité dans le capital de la Société Le Nickel (SLN) au profit de collectivités publiques de Nouvelle-Calédonie, comme le préconisent des élus locaux.

« La perte de la majorité est inconcevable, on préfère vendre la SLN et partir. Nous ne sommes pas des opérateurs financiers, mais des industriels », a déclaré à la presse le patron du groupe minier français.
« Cette majorité n’est pas négociable », a-t-il ajouté.
Au travers de la STCPI, les trois provinces de Nouvelle-Calédonie détiennent 34% de la SLN, poumon économique de l’archipel, Eramet en possède 56% et le Japonais Nisshin Steel Co. LTD. (5407.TO), 10%.
La Nouvelle-Calédonie est entrée au capital de la société métallurgique et minière en 2000, deux ans après l’accord de Nouméa qui organise son émancipation politique et économique, dans le cadre d’un processus de décolonisation.
La STCPI possède en outre 4,1% du capital d’Eramet.
À l’approche de l’issue de l’accord de Nouméa, qui prévoit entre 2014 et 2018 un référendum d’autodétermination, l’État et les dirigeants calédoniens non-indépendantistes et indépendantistes ont lancé une réflexion sur l’élaboration d’un statut négocié.
Un schéma stratégique industriel du nickel est parallèlement en discussion pour rationnaliser l’exploitation minière, que les collectivités aspirent à mieux maîtriser face aux grands groupes.
Les indépendantistes du FLNKS ainsi que certains élus de droite souhaitent que la STCPI monte à 51% dans le capital de la SLN, au moyen d’un échange d’actions Eramet.
M. Buffet a par ailleurs appelé de ses voeux la création « d’un complexe industriel intégré » avec le géant brésilien Vale dans le sud de la Nouvelle-Calédonie, où la SLN espère obtenir le gisement de Prony pour se lancer dans l’hydrométallurgie.
Il a aussi opposé une fin de non-recevoir à André Dang, président de la SMSP, gérée par les indépendantistes kanak, qui veut obtenir d’anciennes mines de la SLN, afin d’alimenter son usine construite en Corée du sud, en partenariat avec le géant de l’acier, Posco.
« On a besoin de tout, on garde tout », a-t-il asséné.

Source : Cagou.com 20 nov.2010

ANALYSE : dans quelle mesure la SLN est-elle devenue un enjeu politique ?

Cet article montre bien l’enjeu politique que représente la SLN dans le cadre du futur statut de la Nouvelle-Calédonie post accord de Nouméa. Le PDG d’Eramet exprime clairement son refus de voir la SLN « nationalisée » comme le souhaite certains politiques. En cela il défend les intérêts de son groupe. Or, la Nouvelle-Calédonie, si elle souhaite être indépendante économiquement, doit pouvoir assurer son propre développement et, à ce titre, a besoin des ressources du nickel (et des autres minéraux en général). Sauf qu’une éventuelle « nationalisation » de la SLN, serait risquée du point de vue économique (perte du soutien d’un grand groupe international qui peut faire face aux aléas de la conjoncture mondiale, mais aussi problèmes de gestion qui lui sont liés) et problématique du point de vue politique. Comment régler ce paradoxe apparent ? Là est tout l’enjeu des années à venir.


titre documents joints

La Société Le Nickel, une entreprise mondialisée

26 février 2012
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Une contribution concernant le premier thème du nouveau programme d’histoire de première.


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